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"Un mot forgé par les Frères musulmans": Bruno Retailleau contredit sur l'origine de l'"islamophobie" par le rapport sur l'islamisme

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Bruno Retailleau a affirmé que le mot "islamophobie" avait été "forgé par les Frères musulmans". Mais le rapport commandé par le ministère de l'Intérieur et remis la semaine dernière n'est pas de cet avis.

En déplacement ce lundi 26 mai à Nanterre pour dévoiler les grandes lignes de sa politique contre l'"entrisme islamiste", Bruno Retailleau a expliqué pourquoi il refusait d'utiliser le mot d'"islamophobie" pour désigner les discriminations contre les musulmans.

"L'islamophobie est un mot que je n'utilise pas car il a été forgé par les Frères musulmans eux-mêmes", a lancé le ministre de l'Intérieur après la remise d'un rapport explosif sur l'influence de cette mouvance politico-religieuse en France.

Le mot "islamophobie" est utilisé à gauche, notamment par La France insoumise, le PS ou encore les Écologistes. "Que Jean-Luc Mélenchon et ses amis parlent comme les disciples de Tariq Ramadan, ça ne doit plus étonner personne", a accusé Bruno Retailleau.

Première utilisation par des ethnologues français

Si le rapport commandé en 2024 par Gérald Darmanin s'attarde longuement sur le terme d'"islamophobie", le qualifiant de "concept piégé", il n'en attribue pas pour autant la paternité aux Frères musulmans.

Comme le rappelle sur X le conseiller parlementaire François Malaussena, la véritable origine du terme islamophobie est détaillée à la page 22 du document, dans un encadré titré "Origines et cristallisation du concept d'islamophobie". Voici ce qu'on y lit:

"Historiquement, le terme islamophobie aurait été utilisé pour la première fois en français au début du 20e siècle, par des ethnologues présents en Afrique inquiets du rejet de la religion musulmane par une partie de l'administration des anciennes colonies. On distinguait alors deux acceptions: 'islamophobie de gouvernement' renvoyant à un 'traitement différencié des musulmans dans l'administration coloniale', et 'islamophobie savante' qui désigne un 'préjugé contre l'islam'".

Selon le rapport, le terme va connaître une "large diffusion" après un rapport du think tank britannique Runnymede Trust en 1997. Mais il gagne véritablement le débat public à partir des attentats du 11 septembre 2001, "un tournant" selon les auteurs.

Un concept utilisé pour "discréditer" les mesures de laïcité

Toujours selon ce document, l'islamophobie désignerait davantage "une forme de 'racisme culturel' qu'une 'intolérance religieuse': on ne vise pas l'islam en tant que foi, mais le fait d'être musulman, d'où le choix de la part de certains auteurs de parler de 'racisme antimusulman'. Toutefois, "nombreux sont les auteurs reliant intrinsèquement la haine de l'islam et le rejet du musulman".

Si le terme "islamophobie" peut faire débat, les auteurs du rapport affirment en revanche qu'il est instrumentalisé par les Frères musulmans "pour discréditer les mesures inspirées par le principe de laïcité, présentés comme relevant d'un racisme d'État visant les musulmans".

Bruno Retailleau s'exprimait lundi pour la première fois depuis la publication officielle, vendredi soir, après de larges fuites dans la presse, d'un rapport faisant état d'une "menace pour la cohésion nationale" avec le développement d'un islamisme "par le bas" de la part des Frères musulmans.

François Blanchard