Qui est Pierre de Villiers, le chef d'état-major des armées qui a démissionné?

Il a déposé les armes. Le général Pierre de Villiers a présenté ce mercredi matin sa démission au président de la République, qui l'a acceptée. Emmanuel Macron et Pierre de Villiers devaient se retrouver dans la journée côte à côte pour la première fois depuis le 14 juillet lors du conseil de défense à l'Élysée, pour "prendre une décision ensemble" sur le budget des armées, avait déclaré lundi le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner.
Passe d'armes entre les deux hommes
Devant une cinquantaine de députés réunis à la commission de la Défense, Pierre de Villiers avait émis de sérieuses réserves au sujet des 850 millions d'euros d'économies réclamées cette année aux armées, jugeant la trajectoire budgétaire "non tenable" et menaçant de démissionner. Il avait même déclaré qu'il ne se laisserait pas "baiser" par Bercy.
Le militaire avait été sèchement recadré le 13 juillet dernier par le président de la République. Emmanuel Macron avait souligné que c'était lui "le chef" et qu'il affectionnait tout particulièrement le "'sens de la réserve qui a tenu nos armées". Il avait reproché à Pierre de Villiers, sans le nommer, d'avoir mis de façon indigne une polémique budgétaire "sur la place publique".
"Personne ne mérite d'être aveuglément suivi"
Le torchon avait continué de brûler entre les deux hommes. Dans une tribune publiée vendredi par Le Figaro, Pierre de Villiers avait appelé à "préserver l'indispensable cohérence entre les menaces, les missions et les moyens" à l'heure où la France est engagée tous azimuts contre le terrorisme, du Sahel (Barkhane) au Moyen-Orient (Chammal) en passant par le territoire national (Sentinelle).
Et dans une "lettre à un jeune engagé", le même jour sur sa page Facebook, il semblait adresser des messages subliminaux à l'exécutif: "Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d'être aveuglément suivi". La confiance "doit être nourrie jour après jour, pour faire naître l'obéissance active, là où l'adhésion l'emporte sur la contrainte".
"Volonté et détermination sans faille"
À 61 ans, Pierre de Villiers était à la tête des armées depuis février 2014, nommé par François Hollande. Frère de l'ancien homme politique Philippe de Villiers, ce général cinq étoiles a grandi en Vendée dans une famille aux valeurs catholiques et traditionalistes. Mais n'a jamais exprimé publiquement d'opinion politique.
Fils d'un général médaillé de la Résistance impliqué dans les activités de l'OAS, comme le rapportait Le Monde, ce diplômé de Saint-Cyr est aussi un fan de football - comme il en parlait lors d'une interview accordée à France bleu - et disait même que ce sport l'avait aidé à réaliser sa carrière. Pour Libération, il se plaisait à comparer l'esprit militaire à celui des sportifs. "J'aime le collectif, l'action en commun."
"Il a reçu les félicitations du commandement américain"
Brillant, franc et fidèle: trois qualités qui le décrivent, selon le général Dominique Trinquant, ancien chef de la mission militaire française à l'ONU, qui l'a rencontré à Saint-Cyr en 1975. "Je reprendrai la devise du maréchal Lyautey: 'j'obéis d'amitié', je crois que ça le caractérise vraiment. Il écoute mais il a une volonté et une détermination sans faille de faire le mieux qu'il peut", confie-t-il à BFMTV.
Du mieux qu'il pouvait au service de la France, au Kosovo d'abord. En 1999, le général de Villiers commande le premier bataillon d'infanterie à entrer dans le pays. Puis l'Afghanistan. "Il a commandé toute la région près de Kaboul, ce n'était pas rien, explique pour BFMTV Bruno Besson, journaliste et ami de longue date. C'était dans le cadre d'une mission de l'Otan, il a reçu les félicitations du commandement américain pour son excellent boulot."
Proche des soldats
En Afghanistan, le journaliste l'accompagne pour un reportage. Sur place, il découvre un chef proche de ses troupes. "On a bien compris que le chef était attentif à ses soldats et ces soldats étaient assez admiratifs de leur chef", ajoute-t-il.
"Il est en contact avec les troupes, il discute très directement avec les soldats, poursuit Dominique Trinquant. Il faut rappeler que dans l'armée il n'y a pas de syndicat. Donc le chef, il commande, et il protège. Ces deux missions sont vraiment chevillées au corps du général de Villiers."
Ce serait, selon lui, la raison de son emportement la semaine dernière à l'annonce du budget réduit de la Défense. Le général de Villiers aurait dû prendre sa retraite le 1er juillet dernier. Mais à la demande d'Emmanuel Macron, il avait accepté de prolonger sa mission pour une année.