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Parlement

Budget 2024: les visages de ceux qui vont ferrailler à l'Assemblée nationale

L'hémicycle de l'Assemblée nationale le 28 juin 2023

L'hémicycle de l'Assemblée nationale le 28 juin 2023 - Christophe ARCHAMBAULT / AFP

Dans un hémicycle sous très haute tension, les députés commencent à s'affronter ce mardi sur le budget de l'État. Les recours multiples au 49.3 qui devrait être rapidement dégainer pourraient encore faire monter la température.

Des débats qui s'annoncent explosifs. Les députés se penchent à partir de ce mardi 17 octobre au soir sur le budget de l'État. Dans un contexte terroriste déjà lourd, les échanges s'annoncent houleux, entre majorité relative, contraintes financières d'un budget scruté de très près par la Commission européenne et un gouvernement qui ne devrait pas tarder à actionner rapidement le 49.3 pour couper court aux discussions. Tour d'horizon des personnalités politiques qui vont ferrailler sur ce texte à l'Assemblée nationale.

•Thomas Cazenave, le ministre qui "a la pression"

Thomas Cazenave à l'Élysée le 4 octobre 2023
Thomas Cazenave à l'Élysée le 4 octobre 2023 © Bertrand GUAY / AFP

Méconnu du grand public, le successeur de Gabriel Attal à Bercy va devoir ferrailler pour défendre le budget, amendement par amendement.

"Même si à la fin, tout passe par 49.3, vous devez très bien connaître les dossiers, savoir répondre à tout. C'est très technique. Il faut vraiment assurer. Il a la pression", résume un ex-collaborateur ministériel qui connaît très bien la séquence.

Sur le papier, pas d'inquiétude. Ce très proche d'Emmanuel Macron qui a travaillé à ses côtés lorsqu'il était ministre de l'Économie a tout de la tête très bien faite, de ses études à l'École normale supérieure à Sciences-Po, en passant par l'ENA.

Passé par le secrétariat général adjoint de l'Élysée pour François Hollande, celui qui était député de Bordeaux avant sa nomination, ne devrait donc guère être pris en défaut sur le fond des dossiers.

Thomas Cazenave a cependant un désavantage: celui d'être peu roué à l'exercice de la joute parlementaire face à des élus de la Nupes qui ne devraient rien laisser passer.

"Je ne l'ai pas trouvé très politique quand il a été auditionné fin septembre par la commission des Finances. J'espère qu'il ne va pas se laisser marcher sur les pieds", avance un député macroniste.

•Éric Coquerel, l'insoumis rodé

Éric Coquerel le 14 avril 2023 à l'Assemblée nationale
Éric Coquerel le 14 avril 2023 à l'Assemblée nationale © Ludovic MARIN / AFP

Le président insoumis de la commission des finances a déjà lancé le ton des débats lors d'une conférence de presse à la rentrée, dénonçant "un budget rempli de contradictions".

Si les relations ont plutôt été cordiales avec la macronie en début de mandature, le ton est monté sérieusement d'un cran lorsque Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale, a jugé irrecevable une proposition de loi pour abroger la réforme des retraites, estimant qu'elle n'était pas budgétée en juin dernier. Éric Coquerel avait pourtant jugé le contraire dans sa commission.

"Il n'a pas peur de la castagne. On ne peut pas lui enlever ça", reconnaît un bon connaisseur de Bercy.

L'insoumis a également pour lui l'expérience du précédent budget l'an dernier sans majorité absolue pour la macronie et a déjà échafaudé une stratégie en tendant largement la main.

Au grand dam de l'exécutif, il est ainsi parvenu à faire adopter un amendement du Modem sur la taxation exceptionnelle des "super-dividendes" en commission des finances début octobre.

• Jean-René Cazeneuve, le rapporteur général du budget, qui veut faire court

Jean-René Cazeneuve, député Renaissance, le 17 février 2023 à l'Assemblée nationale
Jean-René Cazeneuve, député Renaissance, le 17 février 2023 à l'Assemblée nationale © Ludovic MARIN / AFP

Le rapporteur général du budget a beau être l'un des piliers de la majorité, il reste très méconnu du grand public. Amateur d'un humour pince sans rire, c'est déjà lui qui était à la manœuvre l'an dernier.

Cet ancien directeur général d’Apple France et de Bouygues Telecom fut l'un des bons soldats de la macronie lors du précédent quinquennat -apprécié à la fois d'Édouard Philippe et d'Emmanuel Macron.

Grand amateur d'Alexandre Dumas, le député du Gers a déjà fixé ses objectifs: "expliquer la cohérence" du budget de la majorité tout en dénonçant "la volonté d'obstruction de la gauche".

Tout en prévenant: "Je ne suis pas certain que le débat va s'éterniser dans l'hémicycle".

Avec pas moins de 39 heures de débat en commission des finances, celui qui siège avec son fils Pierre Cazeneuve, juge que les "débats ont déjà eu lieu" -une façon de couper court aux critiques quand les 49.3 arriveront.

• Jean-Paul Mattéi, le caillou dans la chaussure de la majorité

Jean-Paul Mattéi à Matignon le 18 septembre 2023
Jean-Paul Mattéi à Matignon le 18 septembre 2023 © Thomas SAMSON / AFP

Le patron des députés centristes a désormais l'habitude de gêner les députés macronistes. Si ce proche de François Bayrou fait bien partie de la majorité, il n'hésite pas à faire entendre sa propre musique.

D'un ISF vert qui fait tousser le gouvernement à un "impôt universel" qu'il soutient avec Éric Coquerel en passant par une taxe sur le rachat d'action des grands entreprises, celui qui est toujours notaire à côté de son mandat parlementaire veut jouer la carte de "la redistribution" des richesses.

Gabriel Attal, à l'époque ministre délégué du Budget, a gardé un mauvais souvenir de l'automne 2022. À l'époque, Jean-Paul Mattéi avait sérieusement bataillé contre l'avis du gouvernement pour parvenir à faire adopter un amendement de taxation des super-dividendes, soutenu par la gauche.

•Jean-Philippe Tanguy, l'atout finances du Rassemblement national

Jean-Philippe Tanguy, président délégué du groupe de députés RN, à l'Assemblée nationale le 17 février 2023
Jean-Philippe Tanguy, président délégué du groupe de députés RN, à l'Assemblée nationale le 17 février 2023 © Ludovic MARIN / AFP

Le jeune homme de 37 ans, formé par Nicolas Dupont-Aignan, a su tirer profit de sa première année à l'Assemblée nationale aux côtés de Marine Le Pen pour s'imposer comme un moteur du groupe dans les médias mais aussi dans les débats techniques.

Jean-Philippe Tanguy devrait particulièrement prendre position sur la question de la TVA qu'il souhaite faire passer à 0% pour les produits de première nécessité, conformément à une promesse de campagne de la présidentielle. Le prix des produits alimentaires a flambé de 22% en 2 ans.

Le député de la Somme, passé par Alstom, s'est rodé aux joutes financières dès l'été 2022 en prenant la tête du projet de loi pouvoir d'achat au nom de son groupe. Quitte à se prendre les pieds dans le tapis en criant "silence pour la France" sous les huées et les moqueries de ses collègues.

"C'est une grande chance de l'avoir. Les débats budgétaires font toujours un peu peur dans nos rangs même si on a beaucoup appris ces derniers mois. Lui fonce et n'hésite pas", sourit un proche de Marine Le Pen.

• Véronique Louwagie, la gardienne du temple LR

Véronique Louwagie le 28 janvier 2020 à l'Assemblée nationale
Véronique Louwagie le 28 janvier 2020 à l'Assemblée nationale © GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP

Députée LR depuis 2012, Véronique Louwagie fait partie des figures de la droite qui comptent, malgré sa relative discrétion médiatique. Dans un parti qui a perdu Éric Woerth, l'un de ses meilleurs spécialistes des finances publiques, désormais à Renaissance et qui est à la peine dans le débat politique, elle pourrait bien se retrouver souvent seule sur les bancs de son camp.

Cette ancienne experte-comptable a pris l'habitude ces derniers mois de décocher ses ses flèches contre la majorité présidentielle tout comme le Rassemblement national. Elle devrait ferrailler sur la question du déficit public.

Parmi ses marottes, la "lutte contre la bureaucratie" et les doublons dans la fonction publique.

Marie-Pierre Bourgeois