"Arrêtez de faire la morale": tension entre Rousseau et le producteur Besnehard lors d'une audition à l'Assemblée

Une véritable crispation. Le producteur de cinéma Dominique Besnehard, notamment connu du grand public pour la série Dix pour cent, a eu un vif échange avec la députée écologiste Sandrine Rousseau ce jeudi 13 mars, en pleine commission d'enquête sur les violences sexuelles dans le cinéma.
"Quand vous avez des propos dénigrants sur des personnes qui parlent, et bien derrière vous envoyez un message", a avancé l'élue parisienne qui dirige cette commission.
"Si c'est mon procès, je me taille"
"Mais c'est quoi les propos dénigrants? Dites-moi. Vous racontez des histoires que vous voyez dans la presse et les choses que j'ai dites sur Depardieu... C'était il y a combien d'années? À un moment, ça va. Si c'est mon procès, je me taille tout de suite", lui a vertement répondu Dominique Besnehard.
Celui qui a notamment financé les productions de Cédric Klapisch, de Michael Haneke ou encore de François Ozon n'a pourtant pas le choix de sa présence à l'Assemblée. Il est obligatoire de se présenter devant une commission d'enquête au risque de poursuites judiciaires. Mais l'échange résume à lui seul combien le sujet des agressions sexuelles est sensible.
La création de cette commission d'enquête avait été réclamée par Judith Godrèche. L'actrice française est devenue la figure de proue du mouvement #MeToo français en 2024 lorsqu'elle a porté plainte pour viols sur mineure contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon, des années après les faits présumés.
Tribune de soutien à Depardieu
Dans ses propos, Sandrine Rousseau fait référence à une tribune signée par Dominique Besnehard et 55 autres artistes en décembre 2023 qui dénonçait "le lynchage" dont serait victime Gérard Depardieu. Les propos du comédien dans l'émission Complément d'enquête sur France 2 diffusée quelques jours plus tôt avaient à l'époque provoqué une onde de choc.
Sur ces images, Gérard Depardieu multipliait les propos misogynes et insultants ciblant des femmes et même une fillette. Quelques semaines plus tard, le producteur de cinéma avait expliqué auprès d'Ouest France avoir commis "une erreur". Gérard Depardieu est également visé par quatre plaintes pour viols et agressions sexuelles.
"Vous voulez me faire dire quoi? Que Depardieu, je ne l'ai pas apprécié à une époque? Vous n'êtes pas là pour faire la morale, je suis désolée. Vous arrêtez de faire la morale à tout le monde. Tout ça commence à bien faire", explique ensuite Dominique Besnehard devant la commission d'enquête.
"Il n'y a que ça qui vous intéresse dans #Metoo? Gérard Depardieu", s'est encore agacé l'homme de cinéma.
"On peut parler de Monsieur Doillon aussi"
Réponse de Sandrine Rousseau: "on peut parler de monsieur Doillon aussi. Quand vous parlez, monsieur Besnehard, votre parole a de l'importance sur le monde du cinéma, des acteurs, des réalisateurs que vous connaissez, du monde de la production".
Le cinéaste Jacques Doillon, visé par des accusations de viols par plusieurs femmes, a été placé sous le statut de témoin assisté en décembre dernier. Tout comme Judith Godrèche, les comédiennes Anna Mouglalis et Islid le Besco ont, elles aussi, accusé le réalisateur d'agressions sexuelles.
Dominique Besnehard qui a travaillé à de nombreuses reprises avec Jacques Doillon l'avait défendu en février 2024 lorsque la comédienne Nora Hamzawi avait déploré la sortie de l'un de ses films dans lequel elle jouait le rôle principal. Sa diffusion a finalement été annulée.
"Des propos minimisant le courage des femmes"
"J’en ai assez de tout ça. Ça devient insupportable cette haine", avait lâché le réalisateur auprès de 20 minutes à l'époque.
"Quand vous avez des paroles sur la libération de cette parole qu'est #Metoo et que vous avez des propos minimisant le courage des femmes et bien derrière, ça envoie peut-être un message", remarque devant la commission d'enquête Sandrine Rousseau.
"Le message, c'est peut-être de dire au monde du cinéma que vous allez le protéger de la parole des femmes", a encore regretté la députée.
Ce lundi, la commission d'enquête a auditionné à huis clos des figures du cinéma français actuel comme Jean Dujardin, Gilles Lellouche, Pio Marmaï ou encore Pierre Niney.
Le rapport de Sandrine Rousseau et du rapporteur Erwann Balanant (Modem) doit être remis au printemps.