Nuages, pluies ou grand soleil: la météo influence-t-elle le taux d'abstention à une élection?

Une électrice dépose son bulletin dans l'urne dans un bureau de vote à Tokyo le 31 octobre 2021 - Behrouz MEHRI © 2019 AFP
À mesure que le scrutin approche, une crainte monte en puissance. Les sondeurs redoutent un fort taux d'abstention lors du premier tour de la présidentielle dimanche. Campagne oblitérée par la pandémie puis par la guerre en Ukraine, crise de confiance dans le personnel politique, candidats et programmes peinant à convaincre: les raisons politiques qui permettraient d'expliquer une faible participation dimanche le cas échéant sont nombreux.
D'après notre sondage "Opinion 2022" de l'institut Elabe pour BFMTV et SFR, publié mardi soir, à la question "êtes-vous certains d'aller voter ?", seuls 62% des Français répondent ainsi "oui". Et un facteur inattendu pourrait bien renforcer ce phénomène politique: la météo.
Le beau temps donne-t-il envie à l'électeur "d'aller à la pêche" plutôt que dans son bureau de vote? Le mauvais temps l'incite-t-il à rester chez lui plutôt qu'à se déplacer pour départager les candidats à la fonction suprême?
Si l'on observe les échéance passées, difficile de statuer. Comme l'a remarqué ici Le Parisien, il faisait beau et doux en France le 21 avril 2002, jour de vote marqué par une forte abstention (28,4%) tout comme le 22 avril 2007, marqué cette fois par une forte participation (16% d'abstention seulement).
Trois degrés supplémentaires, c'est "un point de participation en plus"
Faudrait-il par conséquent renoncer à toute certitude quant au pouvoir de la météo sur la participation? Non, réfute La Chaîne Météo.
"Il apparaît que le taux de participation est influencé par le soleil, la chaleur et les vacances scolaires. Contrairement aux idées reçues, le beau temps ne dessert pas le vote, au contraire."
Citant une étude élaborée entre 2006 et 2007 par les universitaires Christian Ben Lakhdar et Eric Dubois, et s'appuyant sur les chiffres des participations aux présidentielles successives comprises entre 1988 et 2002, l'analyse poursuit:
"Trois degrés de plus que la moyenne augmentent la participation d'environ un point".
La pluie, en revanche, aurait bien un potentiel de nuisance et de découragement, d'après Le Point qui assure ici que "plus le temps est mauvais, moins les électeurs se déplacent pour voter".
"Le taux d'abstention peut même augmenter d'un point", précise encore l'article.
Prétexte
Le ciel a cependant bon dos. Ainsi, le 26 avril 1981, une météo contrastée n'a pas empêché le taux d'abstention de plafonner sous les 19% des inscrits. Autre temps, autres moeurs, l'éventualité ou non de participer suscitait moins de débat chez les Français. Dans leur étude, Eric Dubois et Christian Ben Lakhdar écrivent d'ailleurs:
"Les facteurs de saison peuvent être utilisés par 'les électeurs fragiles' comme un prétexte pour ne pas aller voter".
Une chose est sûre: tous les candidats ne sont pas égaux devant l'abstention. Ce mercredi, notre éditorialiste politique, Matthieu Croissandeau, a en effet souligné que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen étaient les deux prétendants ayant le plus à perdre sur ce plan: "Ce sont eux qui visent cet électorat souvent populaire, peu diplômé, jeune - des gens qui traditionnellement ne vont pas toujours voter. Et c'est avec eux qu'ils peuvent faire la différence, d'où la nécessité de les mobiliser."
Un temps contrasté ce dimanche
Alors à quelle sauce météorologique l'élection présidentielle 2022 sera-t-elle mangée? Le temps s'annonce mitigé ce dimanche au-dessus de l'Hexagone selon Météo France: dans la matinée, une diagonale plongera la moitié nord-ouest du pays dans la grisaille, des Charentes à Lille, tandis que l'après-midi devrait voir les nuages se replier sur la Bretagne, la Normandie, l'Île-de-France, les Hauts-de-France et la Champagne. Et les températures seront elles aussi mitigées - de 0°C en Haute-Marne à 9°C à Nice le matin, puis de 12°C en Lorraine à 17°C à Ajaccio l'après-midi.
