Nicolas Sarkozy évoque un retrait possible d'Afghanistan

Nicolas Sarkozy, qui présentait ses voeux au corps diplomatique, a évoqué vendredi la possibilité d'un retrait anticipé du contingent français en Afghanistan après la mort de quatre soldats tués par un militaire afghan. /Photo prise le 20 janvier 2012/REU - -
par Yann Le Guernigou
PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a évoqué vendredi la possibilité d'un retrait anticipé du contingent français en Afghanistan, qu'il se refusait à envisager jusqu'ici, après la mort de quatre soldats tués par un militaire afghan en pleine campagne électorale.
Le chef de l'Etat, qui présentait ses voeux au corps diplomatique, a mis en outre encore un peu plus la pression sur l'Iran pour son programme nucléaire, estimant que la seule alternative à une intervention armée qu'il ne souhaite pas serait un régime de sanctions "beaucoup plus fort".
L'annonce en début de matinée de la mort de quatre soldats français en Afghanistan a donné une tonalité sombre à cet exercice traditionnel, Nicolas Sarkozy décidant la suspension immédiate par la France de ses opérations de formation et d'appui à l'armée nationale afghane.
Il a demandé au ministre de la Défense Gérard Longuet de se de rendre sur place avec le chef d'état-major des armées pour enquêter sur l'incident et évaluer les conditions de sécurité de ces opérations de formation jugées vitales pour le transfert prévu en 2014 de la sécurité de l'Afghanistan à l'armée du pays.
"Si les conditions de sécurité ne sont pas réunies, alors se posera la question d'un retour anticipé de l'armée française en France", qui n'était pas envisagé avant 2014, a-t-il dit.
Il évoquera le sujet avec le président afghan Hamid Karzaï, qui est attendu dans une semaine à Paris.
Les victimes de vendredi portent à 82 le nombre de soldats français tués en Afghanistan depuis le début de l'intervention des forces de la coalition internationale en 2001.
Malgré l'hostilité de l'opinion - 76% des personnes interrogées étaient contre la présence de troupes françaises en Afghanistan dans un sondage Ifop publié en août par l'Humanité -, Nicolas Sarkozy refusait jusqu'ici d'imiter le Canada, autre grand pays de la coalition, qui a rapatrié ses troupes en 2011.
L'approche de l'élection présidentielle pourrait changer la donne, alors que le Parti socialiste souhaite que les troupes françaises aient quitté le pays en 2012, une position réaffirmée vendredi par son candidat François Hollande.
"C'est une mauvaise nouvelle de plus pour Nicolas Sarkozy et comme les Français sont plutôt hostiles depuis longtemps à la présence en Afghanistan, on peut comprendre qu'il ait cette tentation", dit Gaël Sliman, responsable du département opinion de BVA.
ÉCHEC DU QUARTET
"Mais dans le même temps, il se présente comme courageux et volontaire, quitte à prendre des mesures impopulaires comme son projet de TVA sociale, pour tenter de faire la différence contre son rival socialiste : cette stratégie ne peut marcher que s'il tient sur tous les sujets", ajoute-t-il.
Le président français a d'autre part accusé l'Iran d'avoir menti "de façon continue et à tout le monde" sur ses réelles intentions en matière nucléaire et averti la République islamique que le temps lui était compté avant "une intervention militaire".
"Il faut contraindre les dirigeants (iraniens) à négocier sérieusement avant qu'il ne soit trop tard", a-t-il dit en prônant l'arrêt par tous les pays des achats de pétrole iranien et le gel des avoirs de la banque centrale du pays, des mesures qui doivent être décidées lundi par l'Union européenne.
A propos de la situation en Syrie, il a dénoncé une nouvelle fois la "répression féroce" menée par le gouvernement de Bachar al Assad contre son peuple et appelé la Ligue arabe à y poursuivre son "action courageuse", pressant aussi le Conseil de sécurité de lui apporter son "concours".
Nicolas Sarkozy a d'autre part prôné une relance "rapide et crédible" du processus de paix israélo-palestinien, jugeant que les "printemps arabes" de 2011 "rendaient encore plus inacceptable la situation du peuple palestinien".
Il a estimé que le quartet - Etats-Unis, Russie, Onu, Union européenne - avait échoué dans sa mission de médiation mais n'a pas annoncé d'initiatives nouvelles, se contentant de réitérer la nécessité d'"élargir le cercle de la négociation".
Il a enfin épinglé une nouvelle fois l'opposition socialiste en revenant sur l'idée, envisagée dans l'accord électoral conclu avec les écologistes, d'un partage par la France de son droit de veto à l'Onu avec ses partenaires européens.
"Ça n'a aucun sens parce que cela voudrait dire que ce droit de veto européen serait condamné à la paralysie. Si nous avions dû attendre que tout le monde soit d'accord en Europe pour intervenir en Libye, nous parlerions encore d'une intervention libyenne sur les cendres de Benghazi !"
Avec Patrick Vignal et Chine Labbé, édité par Yves Clarisse