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"Interdiction autorisée": l'opposition tacle la tolérance de Castaner envers les manifestations contre le racisme

Marine Le Pen - Image d'illustration

Marine Le Pen - Image d'illustration - Patrick Kovarik - AFP

Des Républicains au Rassemblement national en passant par certains membres de LaREM, les critiques fusent après l'annonce de l'exécutif d'interdire, mais de tout de même tolérer les manifestations contre le racisme.

Surprise et incompréhension. Invité ce mardi matin sur les antennes de BFMTV et RMC, Christophe Castaner est revenu sur les manifestations contre le racisme qui doivent se tenir dans les prochaines heures sur le territoire français. Et au lendemain de son discours durant duquel il avait annoncé l'abandon de "la méthode de l'étranglement" par les forces de l'ordre, sa position n'a pas manqué d'intriguer ses opposants.

Selon le ministre de l'Intérieur, ces manifestations sont légalement interdites "dans les faits, car il y a un décret du Premier ministre dans le cadre de la deuxième phase du déconfinement." Pour autant, Christophe Castaner a également souligné que "l'émotion mondiale [...] dépassait les règles juridiques qui s’appliquent."

"Nous ne souhaitons pas réaffirmer l’interdiction, qui est de droit, qui est de fait, et il n’y aura pas de sanctions et de procès-verbal pour la participation à cette manifestation. Il faut que cette émotion forte puisse être soutenue", a-t-il encore ajouté. 

"Ses propos sont indignes d’un ministre de l’Intérieur"

Et cette volonté d'interdire, mais en même temps de tolérer ces rassemblements, a fait grincer de nombreuses dents du côté de l'opposition. Ainsi, le président des Républicains, Christian Jacob, a estimé sur Twitter que les propos de Christophe Castaner, qui estime que "l’émotion prédomine sur la loi", met "gravement en danger l’ordre public." 

"Ses propos sont indignes d’un ministre de l’Intérieur. En République, la force doit rester à la loi", a-t-il également écrit. 

Du côté de Bruno Retailleau, sénateur vendéen et président du groupe des Républicains au Sénat, on a également tancé les propos du locataire de Beauvau qui, selon lui, après le "soupçon avéré", a créé le concept de "l’interdiction autorisée."

Julien Aubert, député du parti de droite et président d'Oser la France, y est lui aussi allé de son message incendiaire. 

"Quitte à démolir l’autorité de l’Etat, le gvt veut montrer qu’il a du coeur. Ce n’est pas le seul 'organe' dont les Français souhaiteraient s’assurer qu’il existe à Beauvau! Je veux bien sûr parler de colonne vertébrale", a-t-il lancé sur le réseau social. 

"Il renonce à faire respecter la loi"

Plus à droite, l'annonce de Christophe Castaner de ne pas sanctionner les participants à ces rassemblements a été fraîchement accueillie. La présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a écrit, toujours sur Twitter, qu'il "n’y a plus d’Etat."

"Le ministre de l’Intérieur annonce lui-même que les règles qu’il est chargé de faire respecter ne comptent pas. Après avoir lâché les policiers soumis désormais à la présomption de culpabilité, il renonce à faire respecter la loi", ajoute-t-elle.

Selon le député européen Jordan Bardella, le ministre de l'Intérieur, de par ses déclarations, provoque "la soumission" de la France. 

"Il n'a pas besoin de mettre le genou à terre, il l'a déjà fait symboliquement depuis longtemps. Mais c'est la France et l'autorité de l’État qu'il entraîne avec lui dans la soumission!"

Du côté de Jean Messiha, membre du Bureau National de l'ancien parti de Jean-Marie Le Pen, les mots ne sont pas tendres non plus. 

"Castaner ne sanctionnera pas les manifestations contre le racisme. [...] Il éborgnera et amputera seulement les gilets jaunes dont l’émotion est raciste car ils sont trop Français..."

Pour Florian Philippot, ancien cadre du Rassemblement national, aujourd'hui à la tête de son propre mouvement, Les Patriotes, la critique est également acerbe. 

"C'est le cirque : le ministre de l'Intérieur explique que les manifestations sont interdites mais que l'émotion les justifie. Peut-on organiser des manifs si on est ému, par exemple par l'appartenance de la France à l'UE?", s'est il demandé auprès de France Info. 

"Nous ne sommes plus en état de droit"

De manière plus inattendue, les propos de Christophe Castaner ont également fait des remous au sein même de la majorité présidentielle.

Ainsi, Agnès Thill, député LaREM de l'Oise, se demande, encore une fois sur Twitter, si l'émotion dépassait le droit. 

"Nous ne sommes plus en état de droit", conclut-elle.
Hugo Septier