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Politique

Mali : premières voix discordantes sur l'intervention française

L'ancien ministre de la Défense et ministre des Affaires étrangères Alain Juppé

L'ancien ministre de la Défense et ministre des Affaires étrangères Alain Juppé - -

La classe politique ne loue plus unanimement l'intervention française au Mali, certains critiquant l'isolement de la France dans le conflit et le manque de préparation de l'offensive.

Dans le feu de l'annonce du déploiement des forces françaises au Mali, samedi, la classe politique française avait quasi unanimement salué la décision de François Hollande, laissant Dominique de Villepin, Jean-Luc Mélenchon et une petite poignée d'élus en seuls désapprobateurs. Depuis, certains se sont distingués à droite en critiquant la stratégie française dans ce pays en proie aux islamistes.

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Si Rachida Dati a rendu hommage à François Hollande, Henri Guaino a, lui, appelé à la retenue face à la nécessaire unité "en temps de guerre", repoussant à la fin du conflit l'éventualité d'un débat politique. "Dans toutes les guerres, l'union nationale est nécessaire, c'est une question de responsabilité, de civisme et de respect de nos soldats, qui risquent leurs vies", a insisté le député. Et Henri Guaino n'est pas le seul à avoir témoigné d'une certaine réserve. D'autres à l'UMP se sont inquiétés de l'isolement de Paris et un autre proche de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux, a critiqué une "impréparation" de l'offensive lancée vendredi. "Les soutiens diplomatiques et logistiques ont été à ce jour plus que mesurés et témoignent d'une réelle impréparation", a-t-il dénoncé.

Juppé circonspect

Plus tôt, le président de l'UMP Jean-François Copé avait décoché les premières flèches, dans la même ligne que l'ex-ministre de la Défense Hervé Morin (UDI) qui, lui-même, emboîtait le pas à l'ancien ministre Alain Juppé. Lequel s'est montré particulièrement circonspect, estimant mercredi que le déploiement des troupes françaises au sol au Mali était "extrêmement risqué". "On annonce 2.500 soldats français sur le terrain. Je pense que c'est extrêmement risqué et qu'il faut aujourd'hui mettre le paquet pour que les contingents africains arrivent", a-t-il déclaré.

Les troupes françaises déployées au Mali se trouvent "dans une aire géographique où la France a été [...] colonisateur [...]. La présence de soldats français sur le sol de cette région sahélienne n'était peut-être pas la meilleure chose à envisager", a-t-il estimé.

"Nous avons les moyens de faire ce que nous avons commencé à faire au tout début de cette intervention, c'est-à-dire des frappes aériennes pour arrêter la progression de colonnes terroristes vers Bamako", a relevé l'ancien ministre. Mais, a-t-il souligné, "nous n'avons certainement pas les moyens de nous déployer sur un territoire vaste comme deux ou trois la France [...]. Ils [les islamistes armés] sont chez eux dans le désert, nous n'y sommes pas".

Glissement

"Je crains que nous ne nous soyons mis dans une spirale que nous allons avoir beaucoup de mal à maîtriser. Il est important de clarifier les objectifs de l'intervention française et on a le sentiment qu'il y a un glissement depuis les premières heures ou les premiers jours de cette intervention", a répété Alain Juppé.

"On s'est lancés dans cette opération et aujourd'hui nous sommes confrontés à des risques extrêmement élevés. Et nous sommes seuls", a poursuivi celui qui fut ministre de la Défense et ministre des Affaires étrangères.

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Depuis le début du conflit, seules quelques voix avaient déploré l'initiative française. Selon une enquête de BVA réalisée pour Le Parisien/Aujourd'hui en France, 75% des Français sont favorables à l'intervention militaire française au Mali, contre 33% qui y sont hostiles.

Tristan Berteloot