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Politique

Les patrons ne sont (quand même) pas des martyrs !

Hervé Gattegno

Hervé Gattegno - -

Je réagis à l’expression de Laurence Parisot, la présidente du Medef, qui accuse le gouvernement de « racisme anti-entrepreneurs ».

Tout dans cette formule est déplaisant. Le mot, qu’on a toujours tort d’utiliser avec désinvolture au risque de banaliser les vraies discriminations. Et l’esprit, car on ne peut pas sérieusement prétendre que les chefs d’entreprise seraient victimes d’une discrimination ou qu’ils auraient moins de droits. Ce qui est vrai c’est qu’il y a, dans le discours des socialistes, une forme de stigmatisation contre les « riches ». Mais dans les faits, les patrons sont beaucoup moins ciblés que Laurence Parisot ne le dit… et que François Hollande ne l’avait promis.

Le gouvernement avantage-t-il les patrons ?

Il mène à leur égard une politique équilibrée – ou contradictoire. Sur les 30 milliards d’efforts budgétaires, un tiers touche les entreprises – donc autant que les ménages et que l’Etat. Surtout, l’Elysée mise en plus sur 40 milliards d’allègements de charges patronales, qui seront sans doute compensés par une hausse de la CSG – donc payés par tous les Français. Et puis il y a la réforme du droit du travail qui s’annonce, qui va aller vers la flexibilité que les chefs d’entreprise réclament depuis 20 ans. Finalement, le gouvernement est donc plus flexible que les patrons.

Il y a quand-même des mesures fiscales qui touchent les entreprises et les patrons…

Une augmentation générale des impôts va toucher les plus gros revenus – plus l’ISF et les stocks options, ce n’est que justice. Mais il y a un manque de clarté du gouvernement. L’exemple de la fronde des « pigeons », les créateurs d’entreprises du net, est édifiant. S’il a suffi d’une campagne de 48h pour faire retirer la réforme de l’imposition sur les plus-values, c’est que François Hollande et Jean-Marc Ayrault n’ont pas de vision précise de la ligne qu’ils doivent suivre. Entre la réduction des déficits, le maintien du système social et la compétitivité, ils ne savent pas où placer leur priorité. Mener trois politiques à la fois, c’est n’en mener aucune.

Est-ce que tous les gouvernements ne sont pas obligés de composer avec le patronat ?

Bien sûr que si – mais ça n’a rien d’une honte. Ce qui est idiot, c’est de créer un rapport de forces à coup d’anathèmes pour s’incliner ensuite. La question de la compétitivité est essentielle mais contrairement à ce que fait croire le Medef, elle ne se réduit pas au coût du travail et au niveau des charges sociales – c’est aussi une question d’innovation et d’investissement, qu’une bonne politique doit encourager. C’est notamment avec cet argument (pertinent) que le mouvement des « pigeons » a gagné sa bataille. Politiquement, le gouvernement y a laissé des plumes. S’il cède aux jérémiades de Mme Parisot, il peut faire pire : se changer en dindon.

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Hervé Gattegno