BFMTV
Politique

Le groupe Bellota: comment les jeunes loups de LR sont parvenus au sommet de l'Etat

placeholder video
Les Républicains macronistes forment de longue date un petit groupe d'amis "plus carabin que comploteur". Tous sont aujourd'hui sur le devant de la scène politique.

"Macron a vite repéré notre petit groupe quand il était ministre de l'Économie. On se voyait à la buvette de l'Assemblée": "le petit groupe" en question, c'est celui du Bellota-Bellota, un restaurant espagnol près de l'Assemblée où les étoiles montantes des Républicains ont pris l'habitude de dîner. Certaines parmi les convives accèdent aujourd'hui au firmament: Franck Riester, Sébastien Lecornu, Thierry Solère, parfois Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, Gilles Boyer, Benoist Apparu... sans oublier un certain Édouard Philippe.

"Une fois devenu président, Emmanuel Macron sent qu'il y a des gens qui sont prêts dans ce groupe pour la recomposition politique", expliquait l'un d'eux au JDD

Tous ont participé au dynamitage organisé par le président de la République, et en récoltent désormais les fruits: Premier ministre, conseiller de Matignon, patrons de Bercy, secrétaire d'Etat, questeur à l'Assemblée, président de groupe... la petite bande s'est emparée des manettes du pouvoir. "Hé les mecs, je croyais qu'on avait perdu la primaire!", ricane l'un des comparses en entrant pour la première fois dans le bureau d'Édouard Philippe à Matignon. 

"Plus carabin que comploteur" 

La bande se forme après les législatives de 2012. "Dans ces dîners, il n'y a rien que d'informel. Ce sont des moments de détente. On aime se bidonner et forcément, comme nous sommes des politiques, ça parle politique", confie l'un des membres du cénacle. "C'est plus carabin que comploteur, c'est une troisième mi-temps sympathique", rassure Gérald Darmanin.

Lors des primaires, tous ne roulent pas pour le même leader: Boyer, Apparu et Philippe n'ont d'yeux que pour Juppé, Solère, Lecornu et Riester courent pour Le Maire, quand à Gérald Darmanin, il choisit Nicolas Sarkozy. "Même si nous ne faisions pas les mêmes choix, nous nous entendions très bien et nous savions qu'il n'y avait pas de coups tordus entre nous", confie le Premier ministre Édouard Philippe au Figaro.

Basculement

Lorsque la campagne de Fançois Fillon part en torche, le "groupe Bellota" ne tarde pas à quitter le navire: "On n'avait pas envie de rester dans ce machin dix secondes de plus", se souvient Sébastien Lecornu. Chacun croise occasionnellement Emmanuel Macron dans des dîners, et le constat s'impose: 

"La cohabitation idéologique et tactique au sein des Républicains devient de plus en plus compliquée, analyse l'un de ces happy few. On en tire les conséquences: ce qui compte ce sont les idées, les partis doivent s'adapter."

Emmanuel Macron élu, l'opportunité de concrétiser se présente. "Au début, on se disait que Macron n'oserait jamais mettre un Premier ministre de droite. Mais quand il a nommé un membre de la bande à Matignon, on s'est dit : 'Banco'", témoigne un adepte du Bellota. 

"On commence à évoquer un certain nombre de sujets, "les constructifs" - devenu un groupe parlementaire à l'Assemblée, NDLR. -, notamment. Tout le monde comprend qu'entre La République en marche et Laurent Wauquiez, il y a un espace."

Gérer l'opposition

Cette faction dissidente de LR - les "traîtres" pour la droite "canal historique" - fait évidemment les affaires du président de la République au palais Bourbon, qui voit l'opposition ainsi affaiblie. "Pour éviter que l'Assemblée ne soit trop compliquée à gérer, avec Mélenchon et Marine Le Pen, deux aboyeurs pros, face à un groupe de novices, le président avait intérêt à ce que la droite ne soit pas dans la guerre de tranchées", détaille un sociétaire.

Résultat: la guerre de tranchées dans l'Hémicycle s'est transformée en guerre civile rue de Vaugirard. Reste à l'Élysée de ne pas laisser se développer un Etat dans l'Etat autour de la bande du Bellota.

Louis Nadau