Le gouvernement parie sur le "vert" pour sauver la filière auto

La France mise sur le développement subventionné des véhicules "verts" pour assurer la survie de sa filière automobile mais le plan présenté mercredi par le gouvernement est jugé insuffisant par des analystes, qui lui reprochent de ne pas s'attaquer à la - -
La France mise sur le développement subventionné des véhicules "verts" pour assurer la survie de sa filière automobile mais le plan présenté mercredi par le gouvernement est jugé insuffisant par des analystes, faute de s'attaquer à la compétitivité. "Le gouvernement a choisi l'offensive", a déclaré le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, qualifiant le plan d'"extrêmement ambitieux". Pour aider une industrie en difficulté et menacée par la concurrence internationale, ce plan prévoit de porter de 5 000 euros à 7 000 euros le bonus pour les véhicules électriques et de le doubler à 4 000 euros pour les voitures hybrides. Les bonus-malus relatifs aux véhicules thermiques polluants seront augmentés de 40 à 100% selon les cas, ce qui représente un coût de 150 millions d'euros par an pour l'Etat. L'Etat portera une partie de l'effort en faisant en sorte que 25% des véhicules qu'il achètera à l'avenir soient à moteur électrique ou hybride et que tout nouveau véhicule de sa flotte à usage urbain soit électrique. Cette mesure ne bénéficiera toutefois pas automatiquement à l'industrie française, en vertu des règles de concurrence de l'Union européenne.
Plus de bornes de recharge pour les véhicules électriques
Le gouvernement promet aussi d'accélérer l'implantation de bornes de recharge des véhicules électriques et hybrides rechargeables et s'engage à débloquer des fonds pour favoriser l'innovation dans la filière. Ce plan est lancé alors que le premier constructeur français Peugeot a annoncé une perte de 819 millions d'euros au premier semestre 2012, la suppression de 8 000 postes en France et la fermeture de son site d'Aulnay-sous-Bois. Le gouvernement estime que "l'enjeu de la compétitivité-coût ne résume pas à lui seul les difficultés du secteur automobile", une analyse pourtant soutenue par de nombreux économistes. Or, "le problème de fond c'est un manque de compétitivité, ce plan ne fera que colmater les brèches", estime Marc Touati du cabinet de conseil ACDEFI. "Il y a un problème de pression fiscale et de réglementations trop fortes", ajoute cet économiste, pour qui il y a aussi un risque que les producteurs étrangers profitent plus de ce plan que les constructeurs français : "Est ce que l'offre française est prête ?"
Les syndicats sceptiques
Un banquier a pour sa part estimé qu'il n'y avait pas d'issue pour le secteur automobile, et plus largement pour l'industrie française, hors une baisse draconienne du coût du travail. "Concrètement, il faut repasser la durée du travail à 40 heures, supprimer une semaine de congés payés et la moitié des jours fériés !" a-t-il dit en exigeant l'anonymat. "C'est le mal français. Je ne suis pas très optimiste." Il craint que, faute de mesures fortes, le pays se dirige "vers une crise majeure".
Le scepticisme est aussi de mise chez les syndicats. "Le plan ne résout pas nos problèmes", a dit Tanja Sussest, secrétaire du comité d'entreprise et déléguée du SIA, le syndicat majoritaire à Aulnay-sous-Bois, lors d'une manifestation devant le siège de PSA. "Il propose des mesures bidon." Les hausses de bonus annoncées seront valables jusqu'à fin 2012 et le renforcement de l'ensemble du dispositif bonus-malus sera précisé en loi de finances pour 2013. Le plan gouvernemental prévoit aussi de "réorienter" vers l'innovation 350 millions d'euros d'investissements dits d'avenir, financés par le grand emprunt lancé sous le quinquennat précédent. Le crédit impôt-recherche sera stabilisé et rendu plus accessible aux PME. Un institut de recherche technologique dédié à l'automobile sera lancé avant la fin de 2012.
Surveillance de la concurrence coréenne
Par ailleurs, l'Etat et la banque Oséo mobiliseront 150 millions d'euros pour la trésorerie des sous-traitants de l'automobile. Par ailleurs, 450 millions d'euros seront disponibles pour la modernisation des sites industriels. Enfin, le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA) consacrera 260 millions d'euros à l'accompagnement des projets internationaux et d'innovation des PME du secteur. La France entend par ailleurs demander à la Commission européenne des mesures de surveillance concernant les entrées d'automobiles coréennes. Le gouvernement devrait exiger des contreparties de la part des constructeurs qui bénéficieront de ce plan.