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Politique

Le gaullisme est mort, vive De Gaulle !

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La présence de Florian Philippot du FN et de la socialiste Anne Hidalgo aux commémorations de la mort du général de Gaulle a suscité, ce week-end, une polémique. Pour Hervé Gattegno, c’est une nouvelle preuve que le gaullisme est mort.

Malraux avait dit : « Tout le monde a été, est ou sera gaulliste. » La prophétie était assez mégalo – un ingrédient du gaullisme – mais elle s’est réalisée. Ça ne veut pas dire que tous les courants politiques s’inscrivent dans la continuité de son action mais plus personne n’ose se dire antigaulliste – alors que les socialistes, les libéraux, les centristes et bien sûr l’extrême-droite l’ont combattu de son vivant. De ce point de vue, on peut dire que De Gaulle a gagné mais que le gaullisme a perdu. Après sa mort, Charlie Hebdo avait titré : « Bal tragique à Colombey, un mort. » Samedi, c’était bal cynique à Colombey.

Vous trouvez, comme l'a dit Bernard Accoyer, l'ancien président de l'Assemblée nationale, que le général De Gaulle est l'objet d'une « récupération politique » ?

C’est ce qui pouvait lui arriver de mieux ! De Gaulle n’est pas seulement l’homme du 18 juin et du refus de la capitulation. C’est un militaire qui est arrivé au pouvoir par un coup d’Etat et qui en a été chassé par un référendum : ça ne faisait pas a priori de lui la figure consensuelle qu’il est devenu. Mais ce que les Français lui reconnaissent, c’est la grandeur d’un homme d’Etat et une conception de la politique qui faisait primer l’intérêt général. Alors que tous ceux qui s’inclinent sur sa tombe ou qui le citent en référence le fond parce qu’ils y ont un intérêt particulier. A Colombey, il y a deux églises… et beaucoup de chapelles.

Que Florian Philippot, le bras droit de Marine Le Pen, fasse le pèlerinage de Colombey, vous trouvez que c'est inconvenant ?

Il a le droit d’être là mais la cohérence ne saute pas aux yeux entre ses hommages à De Gaulle et ses responsabilités au FN. Le parti de Florian Philippot a toujours vomi De Gaulle, c’est le parti des anciens de l’OAS, qui a tenté d’assassiner De Gaulle à cause de l’Algérie, un parti dont le président d’honneur est Jean-Marie Le Pen, qui a qualifié l’holocauste nazi de « détail de l’histoire ». Tout cela, justement, ne relève pas du détail. Et c’est pour éviter qu’une telle barbarie se reproduise que De gaulle a poussé à la réconciliation franco-allemande puis jeté les bases de l’Europe. Alors que le FN rêve à voix haute de la déconstruire.

Est-ce qu'on peut seulement imaginer ce que serait une politique réellement gaulliste en 2013 ?

Pas vraiment. Mais on peut imaginer les haut-le-cœur que De Gaulle éprouverait devant le spectacle de notre vie politique. On devine ce qu’il aurait pensé de la glorieuse bataille pour la présidence de l’UMP, en voyant l’Etat bafoué par une jacquerie antifiscale ou son successeur actuel parler de Leonarda à la TV. On peut aussi s’accrocher à l’idée qu’il n’aurait pas laissé la France s’enfoncer dans la dette. De Gaulle disait : « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille » (c’est à dire en fonction de la bourse). Peut-être qu’aujourd’hui, il trouverait que les politiques menées par ceux qui se réclament de lui sont toutes bonnes à jeter à la corbeille.

Hervé Gattegno