Jean-Marie Roughol, SDF: "les gens nous prennent pour des animaux"

Jean-Marie Roughol a 47 ans et vit dans la rue depuis bientôt 25 ans maintenant. Un jour de 2013, il rencontre Jean-Louis Debré sur les Champs Élysées. Il propose à l'actuel président du Conseil constitutionnel de lui garder son vélo le temps de faire ses courses sur la plus célèbre avenue du monde. Le politicien décide alors d'échanger avec le SDF, une discussion qui va se transformer en un livre intitulé Je tape la manche. Les deux hommes étaient les invités de Jean-Jacques Bourdin vendredi sur RMC et BFMTV.
"Regarde, c'est Debré qui parle avec un clodo"
"On s'est rencontré il y a 3 ou 4 ans, j'allais sur les Champs. Il me garde ma bicyclette, puis on parle. Là, un couple lance, à voix haute 'Regarde, c'est Debré qui parle avec un clodo'. Soit je les insulte, soit je décide qu'il a probablement des choses plus intéressantes à dire que ce couple. On a alors décidé d'écrire ce livre", raconte Jean-Louis Debré.
Jean-Marie explique pourquoi il ne parvient pas à retravailler. "Du travail? C'est compliqué: il faut dormir, et la paye arrive plus tard, c'est compliqué." L'homme, qui est également père de trois enfants, a eu besoin de temps pour réaliser cet ouvrage. "Je ne suis pas allé à l'école, j'ai mis beaucoup de temps à écrire. J'ai rempli beaucoup de cahiers, j'ai écris dans les parcs, dans les cafés ou encore sur l'avenue Montaigne. J'écrivais ce qui me venais".
"Des politiques? Y en a qui ne donnent pas aussi..."
Bien sûr, il y a le regard des passants: "Certains ne te calculent pas, d'autres sont sympas. (...) Les gens nous prennent pour des animaux. On est des êtres humains aussi. C'est quelque chose qui peut arriver à tout le monde." Dans la rue, Jean-Marie Roughol croise aussi des personnalités. "Des politiques? J'en croise. Y en a qui ne donnent pas aussi... Qui? Alain Delon, Gérard Jugnot...".
Pour Jean-Louis Debré, "la rue change. Progressivement, ils (les SDF, Ndlr) sont poussés, agressés par des organisations parfois mafieuses. Un jour, une femme n'avait pas récolté assez d'argent dans la journée. Elle a été forcée de rester toute la nuit dans la rue". Le président du Conseil constitutionnel raconte également pourquoi il a souhaité écrire ce livre avec cet homme de la rue. "Vous apprenez la vie. Je voulais chercher comment aider pour notamment communiquer avec ses enfants, pour qu'ils comprennent leur père".
"Avant, il y avait le raclement de gorge. Maintenant, le portable"
Avec le temps, Jean-Marie Roughol a appris comment attirer l'attention des passants pour récolter quelques euros. "Comment? Avec de la psychologie", raconte le SDF. "Avant, pour nous éviter, il y avait le raclement de gorge. Maintenant, l'excuse, c'est le portable", sourit le quarantenaire. Désormais, le rêve de Jean-Marie est d'ouvrir une crêperie. "Comme ça, je pourrai garder le contact avec les gens".