Il est temps de se passionner pour les municipales

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Nous avons, en France, un privilège qui nous coûte trop cher pour ne pas en prendre soin : 36 000 communes, record mondial (12000 en Allemagne).
Les municipales, c’est le luxe qui nous est offert de choisir ceux qui gèrent nos villes et nos villages. C’est d’eux que dépendent nos écoles, nos stades, nos théâtres, l’entretien des rues, la propreté, une partie de la sécurité. Les maires sont les vrais élus de proximité et on ne peut pas pester contre le fossé qui se creuse entre les élus et le peuple et se désintéresser de ceux qui sont les plus proches de nous. C’est le premier enjeu – ce qui veut dire que ce n’est pas le seul.
Il y aura forcément un enjeu politique national : c'est la première fois que tous les Français vont voter depuis la victoire de François Hollande et des socialistes en 2012. Ira-t-on vers à un vote de rejet ?
Les socialistes y croient, eux – ils en ont peur. Avec le quinquennat, les municipales (et les européennes) sont les vraies élections de mi-mandat. Elles permettent de sanctionner la politique du gouvernement et celle de François Hollande n’est pas populaire.
C’est en même temps un test de crédibilité pour les partis d’opposition. Les électeurs peuvent aussi arbitrer entre des lignes politiques : voter pour les listes PS-FG, c’est approuver un accord qui n’existe plus au Parlement ; voter pour des listes Verts-FG, c’est choisir des alliances plus à gauche. Et puis on verra si le Modem obtient plus de sièges quand il s’allie avec le PS ou avec l’UMP – c’est un grand écart politique qui peut produire de grands écarts… de voix.
Les sondages montrent que les électeurs considèrent la fiscalité comme la question prioritaire de cette élection. Est-ce que c'est un enjeu national ou un enjeu local ?
Les deux, parce que le thème du "ras-le-bol fiscal" s’est imposé dans le débat politique et que, si les impôts locaux ont beaucoup augmenté ces dernières années, c’est à cause de la suppression de la taxe professionnelle et du gel des dotations de l’Etat aux collectivités.
Donc les communes ont moins de recettes mais de plus en plus de charges – et à l’inverse de l’Etat, elles ne peuvent pas voter des budgets en déficit. Ce qui relève du débat local, c’est le choix des dépenses à maintenir et des économies à faire (crèches, HLM, vidéo protection…). C’est un débat très politique mais très peu politicien.
Tout le monde va surveiller le poids du FN dans cette élection. Selon quels critères pourra-t-on juger qu'il a gagné ou perdu ?
S’il obtient plusieurs centaines de conseillers municipaux, on pourra parler d’une percée (il en a 85). Ce sera une victoire si le FN remporte quelques villes, ce qui est possible. Et M. Le Pen aura vraiment réussi son coup si le FN arrive à forcer des alliances locales avec la droite entre les 2 tours, contre les consignes nationales de l’UMP. Pour l’instant, le FN a perdu une partie de son pari : il n’aura de listes que dans 500 villes (il en espérait bien plus) et il est nettement à la baisse dans les sondages. On a beaucoup dit que ce parti devait sa croissance à la crise ; il est peut-être en pleine crise de croissance.