Hollande a déjà déçu les siens

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno,du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC. - -
L’an dernier, à La Rochelle, les socialistes étaient en pleine primaire ; ils avaient éludé les désaccords et posé tous ensemble pour la photo. Cette année, ils ne devraient pas avoir à se forcer. Ils devraient être en liesse : François Hollande est à l’Elysée, et le PS contrôle l’essentiel des pouvoirs. Or l’ambiance est moins rose que morose. Le miracle attendu ne s’est pas produit. Le gouvernement a du mal à créer une dynamique, la croissance est en panne et les sondages à la baisse. Il y a de la déception dans l’air. François Hollande voulait « réenchanter le rêve français » ; on dirait qu’il a désenchanté les socialistes.
Est-ce que cette impression ne vient pas du fait que l’aile gauche du PS espère encore une politique plus radicale, notamment sur la fiscalité ou sur le droit du travail ?
Bien sûr – mais c’est un espoir qui est répandu au-delà de la gauche du PS. La plupart des socialistes, comme leurs alliés des Verts, ont rêvé d’une politique nettement ancrée à gauche. Pendant la campagne, ce n’est pas le François Hollande gestionnaire qu’ils ont aimé, mais celui qui désignait la finance comme son « ennemi ». Aujourd’hui, ils ont l’impression de revivre les renoncements de l’ère Mitterrand, mais en accéléré. Psychologiquement, c’est comme si, trois mois après la victoire, on était déjà à mi-mandat. Alors que, politiquement, le plus dur reste à faire.
Vous pensez qu’il ne pourra pas tenir toutes ses promesses de campagne durant son quinquennat ?
C’est évidemment le message. On se souvient que François Fillon avait dénoncé très tôt le risque d’une « faillite » de la France. Mais contrairement à ce qu’il dit par ailleurs dans l’entretien, la dette a bel et bien continué à se creuser sous son gouvernement – y compris avant la crise. Au passage, s’il était à ce point opposé à la politique choisie par Sarkozy, et que néanmoins il l’a appliquée docilement, c’est qu’il reconnaît a posteriori qu’il avait bien un statut de « collaborateur »… En résumé, on dira que le « droit d’inventaire » version Fillon frôle parfois le droit d’inventer – ou de réinventer…
Vous pensez qu’il ne pourra pas tenir toutes ses promesses de campagne durant son quinquennat ?
Personne ne l’a jamais fait. Cela dit, soyons juste : il y a eu des engagements honorés. Mais beaucoup sont des mesures symboliques – sur le smic, l’allocation de rentrée scolaire ou les loyers – qui ne suffisent pas à compenser les économies qui s’imposent partout, les plans sociaux auxquels on ne peut pas grand-chose. Surtout, il manque l’essentiel : des marqueurs politiques forts – la réforme des banques, celle du droit des licenciements, la grande révolution fiscale. Tout cela est reporté sine die. A l’inverse, il y a le traité budgétaire européen, que F. Hollande avait juré de renégocier – et qu’il demande maintenant aux socialistes de voter, à peine augmenté d’un volet « croissance » auquel personne ne croit vraiment. Sur la question de fond, celle du fédéralisme budgétaire, le PS reste profondément divisé.
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