Hollande a bien parlé… pour ne rien dire

Hervé Gattegno - -
J’ai dit jeudi qu’il ne fallait rien attendre de cette intervention : on n’a pas été déçu. François Hollande a parlé, longuement, avec du sérieux, une certaine force parfois, mais il n’a rien dit d’essentiel – rien qui puisse inverser la courbe du chômage ni celle des sondages. La mise en scène de la parole présidentielle était assez réussie : il a beaucoup utilisé le « je », mais ça ne suffit pas à convaincre qu’il est le maître du jeu. Sur le chômage ou la croissance, ses 2 objectifs, il défend surtout les mesures qu’il a déjà prises… mais dont on attend encore les effets.
Il y a quand-même eu quelques annonces : la simplification administrative, une prochaine réforme des retraites… Ça vous paraît sans effet ?
C’est vrai mais sur ces 2 sujets – et d’autres – il n’a donné aucun détail. Pour les retraites, il a parlé d’un allongement de la durée de cotisation, ce qui contredit ses promesses et va ulcérer une grande part de son électorat. Quant à la simplification, il a seulement parlé de la « dématérialisation » des justificatifs à envoyer aux impôts – en ajoutant qu’il y aurait « moins de contrôles », ce qui n’aidera pas à augmenter les recettes fiscales… Pour le reste, sur les dépenses à réduire, la réorganisation des collectivités ou les allocations familiales, c’était plus que nébuleux. S’il s’était appliqué à lui-même le « choc de simplification », peut-être qu’on aurait compris !
Malgré tout, si vous deviez retenir quelques moments de cette interview, ce seraient lesquels ?
Deux aveux, ou deux lapsus. F. Hollande dit qu’il ne faut pas « prolonger l’austérité », ce qui veut bien dire que nous y sommes – ce qu’il a nié jusqu’ici. Et puis il a répondu à une question sur l’orientation de sa politique qu’il n’est « pas un président socialiste, mais le chef d’Etat de tous les Français ». C’est à demi-mot la reconnaissance du recentrage que lui reproche une partie de sa majorité et de son électorat – mais à demi-mot seulement. De fait, ce qui frappe, c’est qu’il a retiré de son discours toute référence explicite à la gauche – rien sur le PS, sur l’écologie, pas un mot sur le 1er ministre. C’était un président solitaire, presque un président minoritaire.
On avait beaucoup dit que ce rendez-vous télévisé devait permettre à F. Hollande de fixer un cap. Est-ce qu’il y est parvenu ?
Il l’a beaucoup répété, en affirmant que son cap, c’est la croissance – mais c’est plutôt un objectif ; la route qu’il veut tracer pour y arriver, elle est restée dans le brouillard. Son registre, c’était moins : « J’ai un cap » que « je suis cap »… A ce stade, il est probable que les Français ne se contentent pas de savoir que F. Hollande sait où il va (JM Ayrault l’a dit aussi la semaine dernière), ils voudraient le savoir eux aussi. Au total, ce que F. Hollande a dit hier soir revenait plus à espérer de la patience qu’à inspirer de la confiance.
Ecoutez ici le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce vendredi 29 mars.