Heures supplémentaires et RTT

J-J B : On sait que vous travaillez à la Poste, est ce que vous avez des heures supplémentaires ?
O B : Moi je n’en fais pas, mais dans mon bureau, il y a beaucoup de collègues qui en font. D’ailleurs c’est assez cocasse : je suis facteur à 80% dans un bureau de Neuilly-sur-Seine, qui est quand même la ville de Nicolas Sarkozy, et il se trouve que dans mon bureau on a donné tellement d’heures supplémentaires qu’on n’avait plus les moyens de les payer. On a donc fait beaucoup de barouf autour de ça, on a menacé d’aller devant les Prud’hommes. Et on a eu gain de cause parce que comme on a un bureau un peu à part, le siège s’en est mêlé et a donné beaucoup d’argent pour payer tout le monde.
J-J B : Le compte Epargne/Temps sera payé si j’ai bien compris ?
O B : Exceptionnellement, dans mon bureau, oui. Parce qu’on s’est mobilisés pour ça.
J-J B : C’est normal que les heures supplémentaires soient payées ?
O B : Bien sûr que c’est normal. Mais ce n’est pas normal de devoir se battre pour ça. Ce n’est pas normal de se mobiliser pour que les heures sup’ soient payées. Parce que le vrai scandale, derrière le slogan « travailler plus pour gagner plus », c’est qu’aujourd’hui il y a neuf plaintes sur dix à l’inspection du travail qui sont posées par des salariés qui font des heures sup’ qui ne sont pas payées. C’est vrai à la Poste, mais je ne crois pas qu’on soit les plus à plaindre. C’est aussi vrai dans l’hôtellerie, dans le bâtiment. Ce qui veut dire qu’à la rentrée, il y a des tas de personnes, des tas de salariés dans ce pays qui vont se rendre compte à quel point ce slogan finalement a été un mirage.
J-J B : Les RTT payées, c’est une bonne idée ? Donner la possibilité à un salarié de recevoir de l’argent en contrepartie de ces RTT c’est une bonne idée ?
O B : Je trouve que c’est une très mauvaise idée.
J-J B : J’ai besoin d’argent pour finir mon mois, ou pour Noël, ou peu importe, et on me propose de travailler le dimanche, et j’en ai envie. Pourquoi être contre ?
O B : Je suis contre le travail le dimanche. Le problème n’est pas individuel. Vous me proposez le travail le dimanche et les heures supplémentaires… Moi je vous propose autre chose : augmenter tous les revenus de 300 euros nets par mois. On verra qui, pour le plaisir, travaillera le dimanche ou avec des heures supplémentaires et ce jusqu’à 65 ans. En augmentant tous les revenus de 300 euros nets par mois, on reviendrait simplement à la répartition capital/travail qui existait il y a un peu plus de trente ans.
J-J B : Et où vous trouvez l’argent ?
O B : Justement, en faisant en sorte que le monde du travail récupère simplement au capital ce que le capital a volé au monde du travail ces trente dernières années, sous forme d’exonération de cotisations sociales qu’on compte chaque année à plus de 20 milliards d’euros, sous forme de subventions publiques, et en bloquant les salaires. Si on revient simplement à la répartition capital/travail, on augmente tous les revenus de 300 euros nets par mois. Qu’on ne vienne pas me dire que c’est une utopie. Je ne préconise pas une révolution, juste un retour à quelque chose qui existait avant. Mais il faut avoir la volonté de poser le problème essentiel qu’est celui de la répartition des richesses. Et prendre l’argent sur les profits faramineux. Parce que finalement le comble c’est qu’on continue à nous faire croire que la France s’appauvrit alors que la France n’a jamais été aussi riche en ce moment. Les richesses ont augmenté de 30% ces vingt dernières années.
J-J B : L’Etat n’est pas en faillite ?
O B : L’Etat n’est pas en faillite. Il organise aujourd’hui ses propres déficits, comme par exemple la Sécurité Sociale, ce fameux trou de la Sécu.
J-J B : Vous n’y croyez pas ?
O B : Si, il existe, mais il ne tombe pas du ciel. La Sécu est financée avec nos cotisations sociales, c'est-à-dire une partie de notre salaire. Depuis plus de vingt ans, l’ensemble des gouvernements libéraux, de Droite comme de Gauche, exonère de cotisations sociales à hauteur de plus de 20 milliards chaque année, les plus grands groupes industriels pour soi-disant faire de l’emploi. Or il y a toujours autant de chômage. C’est ainsi qu’on crée le trou de la Sécurité Sociale. Ensuite on a les pouvoirs publics, qui ont créé ces déficits, qui se retournent vers les patients en leur disant : Il y a un trou dans la Sécu donc vous allez le payer comme patient par le système de franchises médicales.