Espionnage: la France a-t-elle sous-réagi?

La France figurerait parmi les "38 cibles" surveillées par l'Agence nationale de sécurité (NSA) américaine - -
De l'inégalité de la réaction. En Allemagne les révélations de Der Spiegel sur une surveillance à grande échelle des communications électroniques dans l'Union européenne par les services secrets américains ont suscité l'indignation.
En France, François Hollande a réagi lundi à la mi-journée. Une intervention tardive alors que les réactions apparaissent plus disparates qu'outre-Rhin. Passage en revue.
> Hollande: que "cela cesse immédiatement"
Il a fallu attendre lundi midi pour que François Hollande fasse part de sa position sur ces soupçons d'espionnage. En marge d'une visite à Lorient, il a affirmé que la France ne peut "pas accepter ce type de comportement", et a demandé que "cela cesse immédiatement".
Le chef de l'Etat a également estimé que "les éléments sont déjà suffisamment réunis pour que nous demandions des explications".
> Riposte tardive
Dimanche matin, l'hebdomadaire allemand ravive la flamme de l'affaire Snowden en affirmant que l'UE est la cible d'écoutes clandestines par les Etats-Unis dans le cadre du programme Prism.
Alors que les Allemands ont rapidement sommé Washington de fournir des explications, évoquant même le temps de la "guerre froide", de son côté le gouvernement français a tardé à réagir.
Ce n'est que dans l'après-midi, qu'un timide communiqué émanant du ministère des Affaires étrangères fait office de droit de réponse. Pas de sanctions ni d'ultimatum au programme.
"La France a demandé aujourd’hui des explications aux autorités américaines au sujet des informations dévoilées par l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, selon lesquelles la National Security Agency (NSA) aurait espionné les institutions de l’Union européenne", déclare le chef de la diplomatie Laurent Fabius. Avant de préciser que si ces faits "étaient confirmés, ils seraient tout à fait inacceptables".
> Indignation pour Taubira, de Sarnez, Mélenchon, Le Pen...
Même si Christiane Taubira a assuré que la France était "active" sur ce dossier, elle a néanmoins estimé dimanche soir sur BFMTV que si les allégations d'espionnage des institutions européennes par Washington s'avéraient, cela constituerait "un acte d'hostilité inqualifiable".
Pour Marielle de Sarnez, vice-présidente du MoDem et eurodéputée, il faut une enquête de l'UE sur les informations du Spiegel ainsi que des "sanctions sévères" si ces accusations étaient confirmées.
Jean-Luc Mélenchon s'est indigné ce dimanche soir. "Je demande qu'on arrête immédiatement les négociations avec les nord-Américains jusqu'à ce que cette affaire soit clarifiée", a-t-il indiqué au micro de BFMTV, en référence aux négociations sur le traité de libre-échange. Il a même appelé la France à accueillir Edward Snowden, "défenseur de la liberté".
Une demande également formulée par Europe Ecologie - Les Verts qui souhaite que soit accordé "l'asile politique" à l'Américain, "lanceur d'alerte".
Marine Le Pen, présidente du FN, a elle aussi réclamé l'asile politique pour Edward Snowden ce lundi matin. Il faut que la France "accorde sa protection à quelqu'un qui a fait oeuvre de bien public", a-t-elle indiqué sur LCI, estimant que cette affaire était révélatrice de la "politique de soumission totale aux Etats-Unis", menée par les dirigeants européens.
> Fleur Pellerin et l'UMP à contre-courant
Quand certains se disent choqués, d'autres relativisent. C'est le cas de Fleur Pellerin, la ministre de l'Economie numérique qui invite à "distinguer deux choses".
"Il y a l'affaire d'espionnage de l'Union européenne et des postes diplomatiques et ça, ce n'est pas vraiment la première fois que ça arrive dans l'Histoire", a-t-elle commenté lundi sur BFMTV.
Enfin, à l'UMP, la position est également prudente. Jean-Fançois Copé, président du parti, a estimé que les faits, s'ils étaient vérifiés, "entacheraient la relation entre l'Union européenne et les Etats-Unis". Il en a profité pour dénoncer la "vulnérabilité" et la "naïveté du fonctionnement" des institutions européennes.
Le député UMP Frédéric Lefebvre a souhaité, lui, "qu'il ne soit pas fait de procès d'intention à l'endroit de nos alliés américains". "Prenons garde de ne pas fragiliser des relations de confiance sur la base d'informations de presse non confirmées, alors qu'une enquête semble toujours en cours", a-t-il écrit dimanche soir dans un communiqué le député des Français d'Amérique du nord.