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Présidentielle: à quoi va ressembler 2017 sur Internet?

Une photo de François Hollande le 10 juillet 2016 (Photo d'illustration)

Une photo de François Hollande le 10 juillet 2016 (Photo d'illustration) - Georges Gobet - AFP

Avec des outils comme les directs vidéo ou les nouveaux réseaux sociaux, les candidats à la présidentielle parient sur l'instantanéité et le lien direct avec l'internaute. Mais moins visible, l'enjeu de la collecte des données est celui qui peut faire basculer la présidentielle de 2017.

Dernier été avant la présidentielle. Alors que la France se repose, les équipes des candidats s'agitent. Déclarés ou pas, ceux-ci préparent déjà leur rentrée, qui s'annonce bouillonnante. Une rentrée qui va se placer sous le signe du numérique. Réseaux sociaux, logiciels professionnels, nouvelles applications: rien n'est trop beau – ni moderne – pour attirer l'électeur.

Bruno Le Maire, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et même François Hollande n'ont pas échappé à la tendance actuelle: le direct vidéo. Proposé par l'application Periscope, ou par l'outil live de Facebook, il séduit les responsables politiques.

La mode des directs vidéo

L'équipe de Bruno Le Maire organise ainsi une fois par mois une séance de questions/réponses sur Facebook live entre le candidat et les internautes.

"Avant, on faisait ça sur Facebook mais par écrit, et les gens doutaient parfois de la sincérité de l'exercice", raconte Kéliane Martenon, responsable à plein temps du numérique pour le candidat à la primaire à droite. "Depuis avril, on fait ça en direct, sans préparer de questions avant avec les internautes. Ça apporte une transparence et une sincérité".

L'outil est gratuit, facile d'utilisation. "Il permet au candidat de s'adresser directement aux gens", analyse le communicant Philippe Moreau-Chevrolet.

Pour certains candidats comme Marine Le Pen, il permet surtout de contourner les médias traditionnels, avec lesquels elle se dit en désaccord. "Avec les réseaux sociaux, on peut court-circuiter les médias traditionnels, mais pour cela, il faut que chaque militant s'empare des réseaux sociaux pour convaincre", disait la présidente du Front national lors de son discours du 1er mai. Plus d'intermédiaire, pas de contradicteur, un budget en baisse: "C'est plus rentable qu'une séance de questions sur un plateau de télévision, et cela ne vous empêche pas d'être repris dans une dépêche de l'AFP", note Philippe Moreau-Chevrolet.

Reste qu'à force d'être utilisé par tous, le direct vidéo risque de se banaliser et de perdre en originalité – surtout si les images proposées sont classiques et n'apportent rien de nouveau. D'autres applications sont déjà bien installées, comme Instagram: Nicolas Sarkozy y compte plus de 60.000 abonnés, et Bruno Le Maire a même engagé un JRI (journaliste reporter d'images) à plein temps pour alimenter son compte.

Des candidats à la présidentielle sur Tinder?

D'autres réseaux, ciblant un public plus particulier, pourraient peu à peu être utilisés par les politiques: Snapchat, par exemple, pour toucher les jeunes même si pour l'instant, son utilisation par les équipes de campagne en est à ses balbutiements. Même l'application de rencontres Tinder, dont l'utilisation pour la campagne de Bernie Sanders aux Etats-Unis a été remarquée, est susceptible de faire son arrivée en France, sans qu'on sache encore réellement sous quelle forme. "C'est un risque, mais ce serait une façon décalée d'aller chercher les gens là où ils ne s'y attendent pas. Pour séduire, il faut chercher la nouveauté", explique Philippe Moreau-Chevrolet.

"Il y a toujours de nouveaux espaces qui se développent via la démultiplication des réseaux sociaux. Cela signifie qu'on va dépenser de plus en plus d'énergie pour gagner la bataille de l'image", prédit Valerio Motta, ancien directeur de la communication du PS. Et surtout, l'instantanéité de ces outils risque d'accélérer encore davantage le calendrier politique.

Les bases de données, vrai nerf de la guerre

Mais celui qui a participé à trois campagnes présidentielles côté socialiste avertit: "Sur le numérique, les réseaux sociaux ne font pas tout. Ce qui fait la différence, c'est l'organisation de la campagne, les campagnes de mailing et la collecte et l'organisation des données". Objectif: collecter des informations fiables sur les électeurs pour se constituer une solide base de militants, prêts à arpenter le terrain pour leur candidat.

"Si Emmanuel Macron a lancé 'En Marche' avec la traditionnelle campagne de porte-à-porte, c'est justement pour se constituer une base de données, et tester sa campagne", abonde Philippe Moreau-Chevrolet. Le ministre, qui ne s'appuie pas sur les fichiers du PS dont il n'est plus membre, aurait même fait appel à une start-up de stratégie électorale, spécialisée dans la collecte et l'organisation des données.

D'autres, comme Alain Juppé, Jean-Luc Mélenchon et NKM, utilisent à cet effet un logiciel professionnel mis au point aux Etats-Unis, Nation Builder. "Le parti n'est plus l'endroit où ça se passe, il faut trouver un autre moyen d'atteindre les gens. Puis il faut mettre des outils à leur disposition et les laisser faire campagne". Pour le communicant, "les candidats ne doivent pas tout contrôler: une campagne réussie est une campagne décentralisée". Armé d'un smartphone, militant connecté, l'internaute pourra-t-il un jour remplacer la force de frappe d'un parti politique?

https://twitter.com/ariane_k Ariane Kujawski Journaliste BFMTV