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"On n'a même pas de discussion": la température monte d'un cran entre Philippe et Macron

Edouard Philippe et Emmanuel Macron le 14 avril 2022 au Havre

Edouard Philippe et Emmanuel Macron le 14 avril 2022 au Havre - Ludovic MARIN / AFP

À six semaines des législatives, les négociations entre Horizons et LaREM sont au point mort, au grand dam de l'ancien Premier ministre. Il espère pouvoir capitaliser sur des circonscriptions détenues par LR. Au sein de la macronie, la méfiance est toujours de mise.

Une volonté de ne pas faire de cadeau à Édouard Philippe. Moins de 72 heures après la réélection d'Emmanuel Macron, l'ancien Premier ministre a fait savoir qu'il n'appréciait guère de ne pas être autour de la table des négociations pour les législatives au sein de la majorité. "Horizons n'est tenu par aucun deal dans la mesure où nous ne sommes pas autour de la table", a clarifié le maire du Havre devant ses lieutenants ce mardi lors du bureau politique d'Horizons.

"C'est très simple. Il n'y a même pas de discussion en cours. On a fait part de notre surprise devant la méthode", lâche Arnaud Péricard, l'un des référents régonaux du parti à BFMTV.com, à 6 semaines du premier tour des législatives.

Décrocher des "circonscriptions de conquête"

Édouard Philippe, qui n'a de cesse de clamer "sa loyauté" et "sa liberté", comptait pourtant sur un accord avec La République en marche pour s'assurer d'obtenir un groupe à l'Assemblée nationale. Si certains parmi les députés LaRem évoquent 35 circonscriptions gagnables, personne au sein d'Horizons ne veut confirmer ce chiffre.

"Notre objectif, c'est d'avoir un groupe (qui nécessite d'obtenir au moins 15 députés NDLR). Et nous sommes prêts à aller sur des circonscriptions de conquête détenues par la droite", assure de son côté le député Thomas Mesnier et porte-parole du parti.

Le nœud du problème se situe précisement là. Emmanuel Macron veut dynamiter les LR, en grande difficulté depuis le piteux score de Valérie Pécresse, à son profit, avec Nicolas Sarkozy en embuscade. Mais Édouard Philippe compte bien capitaliser sur les restes de son ancienne famille pour récupérer des députés déçus dans le giron d'Horizons.

Popularité sur le terrain

Exemple à l'appui dans la circonscription de Fontainebleau (Seine-et-Marne) où la candidate investie par Emmanuel Macron a été battue à plate couture par la députée LR en 2017.

"Il y a beaucoup d'endroits sur des terres de centre droit où LaREM n'a pas fait des scores faramineux en 2017. On peut faire basculer ces circonscriptions et renforcer le poids de la majorité", assure ainsi Frédéric Valletoux, le maire de Fontainebleau et intime d'Édouard Philippe.

En guise d'argument pour convaincre la macronie de lui faire de la place, ses proches ont un argument massue: sa popularité.

"Il a rempli les salles pendant la présidentielle, il était très demandé par les militants et les responsables locaux. C'est l'un des rares à pouvoir faire ça", analyse Arnaud Péricard.

Une interview qui reste en travers de la gorge

Sur les bancs de la macronie, on est plus dubitatif.

"On nous avait dit que son meeting à Nice avec Christian Estrosi (le 23 mars dernier NDLR) ferait le plein. On a fait un bide. donc son côté superstar... Merci bien", avance un cadre de la majorité.

C'est qu'autour d'Emmanuel Macron, on se méfie toujours de l'ancien locataire de Matignon. Malgré de belles images des deux hommes au Havre dans les derniers jours de campagne, certains s'inquiètent de ses velléités d'indépendance.

Une interview d'Édouard Philippe dans laquelle il attaquait les choix budgétaires du gouvernement au magazine Challenges en octobre dernier est restée dans les mémoires.

"Capable de bien nous emmerder"

"C'est pas lui qui va nous aider à avancer sur les questions sociales. Je dirais même qu'il est capable de bien nous emmerder quand on va vouloir faire plus écolo. Donc on veille bien à limiter sa capacité de nuisance", lâchait un député de l'aile gauche à BFMTV.com pendant l'entre-deux-tours.

"Personne n'est idiot. C'est l'intérêt commun de la majorité qu'on se mette tous d'accord. Nous ne sommes ni des adversaires ni des ennemis. On veut tous que le second mandat d'Emmanuel Macron réussisse", assure Frédéric Valletoux.

Pour arriver en position de force en 2027, Édouard Philippe sait que ce quinquennat doit fonctionner.

Marie-Pierre Bourgeois