Doutes dans la majorité sur les grands chantiers 2011 de Sarkozy

Une partie de la majorité paraît douter de la possibilité de mener à bien en 2011 les deux grands chantiers dont Nicolas Sarkozy a fait une priorité de l'année à venir, à savoir une réforme fiscale et la création d'une nouvelle branche de la Sécurité soci - -
par Emmanuel Jarry
PARIS (Reuters) - Avant même d'entrer dans le vif du sujet, une partie de la majorité paraît douter de la possibilité de mener à bien en 2011 les deux grands chantiers dont Nicolas Sarkozy a fait une priorité de l'année à venir.
Le chef de l'Etat s'est engagé à supprimer le bouclier fiscal - qui plafonne à 50% des revenus les impôts directs d'un contribuable - et l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), pour les remplacer par un impôt sur les revenus du patrimoine.
Il a également promis de créer une nouvelle branche de la Sécurité sociale, qui entrerait en vigueur en 2012, année des prochaines élections présidentielle et législatives, pour faire face à la dépendance des personnes âgées.
"Nous prendrons les décisions à l'été 2011", a-t-il dit lors d'une intervention télévisée le 16 novembre.
Le Premier ministre, François Fillon, a pour sa part réuni lundi un groupe de travail de la majorité parlementaire sur la réforme de la fiscalité du patrimoine, qui doit prendre la forme en avril prochain d'une loi de finances rectificative.
Les objectifs de réduction des déficits publics que s'est donnés le gouvernement risquent cependant fort de le priver des marges budgétaires nécessaires et la majorité paraît divisée sur l'ampleur et les modalités de ces deux réformes.
Dans une interview publiée lundi par le quotidien économique Les Echos, l'ex-conseiller social de Nicolas Sarkozy, Raymond Soubie, semblait lui-même douter du calendrier du chef de l'Etat en ce qui concerne la réforme de la dépendance.
COMMENT FINANCER LA DÉPENDANCE ?
"Le problème est de se mettre d'accord sur son financement. Le consensus est souhaitable mais il est difficile", disait-il, en se bornant à estimer qu'il faudrait réaliser cette réforme avant la présidentielle de 2012, "si c'est possible".
Même prudence de l'ancien ministre Hervé Novelli, secrétaire général adjoint de l'UMP.
"Si on peut régler très vite ce problème, pourquoi pas. Mais encore faut-il s'assurer de trouver les recettes nécessaires", confiait mercredi à Reuters ce libéral, en marge du point de presse hebdomadaire des dirigeants du parti présidentiel.
Une partie de la difficulté réside dans la définition de la part de financement dévolue à la solidarité nationale - les uns, notamment les centristes, plaident pour une part majoritaire, les plus libéraux privilégient un financement assurantiel.
"Est-ce qu'on aboutira à une solution avant 2012 ? Je n'en suis pas sûr", souligne l'autre secrétaire général adjoint de l'UMP, le centriste Marc-Philippe Daubresse.
Le porte-parole du gouvernement, François Baroin, s'est gardé de prendre position sur le calendrier. "Nous verrons bien comment ce débat avance dans les mois qui viennent", a-t-il dit lors du compte rendu du conseil des ministres.
La ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, Roselyne Bachelot, chargée de ce chantier, a laissé entendre mardi sur France Info que la réforme de la dépendance pourrait être menée en deux temps, l'un à l'automne 2011, l'autre après l'élection présidentielle.
Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, plaide pour sa part pour une réforme "avant la présidentielle".
RISQUE POLITIQUE
Où placer le curseur ? C'est aussi la question posée pour la réforme de la fiscalité du patrimoine, notamment pour compenser un manque à gagner de plus de trois milliards d'euros pour l'Etat en cas de suppression pure et simple de l'ISF.
Nicolas Sarkozy est opposé à la mise en place d'une tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, que préconisent une partie des élus de la majorité. Mais Jean-François Copé, favorable comme le chef de l'Etat à une augmentation de la fiscalité des revenus du patrimoine, admet que "le compte n'y sera pas".
"Notre volonté politique n'est pas de faire disparaître coûte que coûte l'ISF", nuançait d'ailleurs mardi François Baroin dans une interview au Monde. "Elle est de faire émerger (...) une imposition sur le patrimoine équitable, simple, non pénalisante pour l'économie et stable."
Certains dirigeants de la majorité voient également dans la suppression de l'ISF un risque politique trop important en année pré-électorale et plaident pour un simple aménagement afin de ménager une opinion publique très sensible à ce sujet.
"La suppression de l'ISF serait une faute politique", estimait en octobre le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire. "Elle serait incompréhensible pour les Français au moment où nous demandons des efforts de réduction des dépenses et cherchons des recettes supplémentaires."
Edité par Patrick Vignal