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Coup d'éclat d'un haut magistrat pour une réforme du parquet

Le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, a vivement condamné l'ingérence du pouvoir exécutif dans le fonctionnement de la justice et prôné une indépendance totale des procureurs, lors d'une cérémonie de rentrée solennelle. /Photo d'

Le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, a vivement condamné l'ingérence du pouvoir exécutif dans le fonctionnement de la justice et prôné une indépendance totale des procureurs, lors d'une cérémonie de rentrée solennelle. /Photo d' - -

PARIS (Reuters) - Un des plus hauts magistrats français a vivement condamné vendredi l'ingérence du pouvoir exécutif dans le fonctionnement de la...

PARIS (Reuters) - Un des plus hauts magistrats français a vivement condamné vendredi l'ingérence du pouvoir exécutif dans le fonctionnement de la justice et prôné une indépendance totale des procureurs.

Lors d'une cérémonie de rentrée solennelle, le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, a fustigé le soutien apporté par le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, à des policiers ayant manifesté contre la condamnation de sept d'entre eux à Bobigny (Seine-Saint-Denis) en décembre.

"Afficher pour la justice une forme de mépris, inspirer à l'opinion des sentiments bas en instillant de manière extravagante la confusion entre la responsabilité du criminel et celle du juge (...), tout cela avilit l'institution et en définitive, blesse la République", a-t-il dit.

"Le scandale n'est-il pas plus grand quand ces protestations politico-corporatistes sont relayées au plus haut niveau, au mépris du fondamental principe de séparation des pouvoirs ?", a-t-il ajouté, sans toutefois nommer Brice Hortefeux.

Contre les intentions de la majorité actuelle, ce magistrat de 67 ans, qui va partir en retraite, pense inévitable une réforme radicale du statut des procureurs en France, où ils sont actuellement nommés par le chef de l'Etat et peuvent recevoir des ordres du ministre de la Justice.

"La seule solution est de couper tout lien entre l'échelon politique et le parquet pour ce qui concerne les nominations", a-t-il dit.

RÉFORME INÉLUCTABLE

Jean-Louis Nadal prône une réforme où le Conseil supérieur de la magistrature, organe indépendant, serait seul maître de la procédure, alors qu'actuellement le ministre de la Justice propose les candidats et que le chef de l'Etat dispose après avis consultatif du CSM.

Il a estimé que la réforme était inéluctable après des arrêts récents de la Cour européenne des droits de l'homme concluant que le procureur français ne pouvait pas être vu comme une autorité judiciaire.

"Je crois donc venu le temps d'un pouvoir exécutif se maintenant en dehors des nominations de magistrats du parquet", a dit le magistrat. Il envisage, si une telle réforme voit le jour, que soit créé un "procureur général de la nation", qui serait au-dessus des procureurs.

"Le seul regard sur l'avenir de notre justice qui forcerait respect dans notre démocratie, c'est de préparer l'avènement de ce fameux pouvoir judiciaire dont je viens de tracer les traits", a conclu Jean-Louis Nadal.

Ce discours intervient alors que le système judiciaire est en pleine confusion. L'Elysée, qui a abandonné l'idée de supprimer les juges d'instruction, veut faire voter cette année l'entrée de jurés populaires en correctionnelle.

Les syndicats de magistrats jugent ces projets inutiles, coûteux et souhaitent que la priorité soit donnée au problème du statut du parquet.

Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse