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Politique

Conseil constitutionnel: Juppé respecte "un devoir de réserve" vis-à-vis de Ferrand mais démine certaines critiques

L'ancien Premier ministre Alain Juppé le 8 mars 2022 à la sortie de l'Élysée

L'ancien Premier ministre Alain Juppé le 8 mars 2022 à la sortie de l'Élysée - Ludovic MARIN / AFP

L'ancien Premier ministre, lui-même nommé au Conseil constitutionnel par Richard Ferrand en 2019, refuse de se prononcer directement sur la potentielle nomination de ce dernier, proposée par Emmanuel Macron. Il répond cependant indirectement à certaines critiques.

Membre du Conseil constitutionnel, Alain Juppé commence son interview sur RTL ce mardi 11 février en rappelant les obligations liées à son mandat: "Nous ne sommes pas entre-nous, je suis soumis à un devoir de réserve." En conséquence, l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac refuse de "porte(r) un jugement" publiquement sur les trois nouvelles personnalités qui pourraient rejoindre les Sages prochainement, en remplacement des membres de l'instance qui achèvent leur mandat de neuf ans.

Plus précisément, il ne dira rien du choix d'Emmanuel Macron de proposer en remplacement de Laurent Fabius son fidèle lieutenant Richard Ferrand pour prendre la tête du Conseil constitutionnel. Lui-même nommé en mars 2019 sur proposition de ce dernier du temps où il était président de l'Assemblée nationale, Alain Juppé démine cependant certaines critiques sans évoquer directement le macroniste, battu lors des élections législatives de 2022 mais toujours consulté par Emmanuel Macron malgré son retrait apparant de la vie politique.

"Il faut faire un peu confiance à la déontologie des personnes"

Premier point évoqué: les compétences pour exercer dans cette institution chargée de se prononcer sur la conformité constitutionnelle des lois. Si Richard Ferrand n'est pas un spécialiste du droit, Alain Juppé questionne: "Qu’est-ce que c’est qu’un juriste? Est-ce que c’est uniquement un professeur de droit constitutionnel? Je ne le pense pas." L'ex-maire de Bordeaux ajoute: "Sur les neuf membres (actuels) du Conseil constitutionnel, trois viennent du Conseil d’État, deux ont été avocats pendant de très longues années et une est magistrate. Donc cela fait six (spécialistes du droit) sur neuf."

Par ailleurs, "avoir à l'intérieur du Conseil constitutionnel, des hommes et des femmes qui ont eu l'expérience du gouvernement ou du Parlement, c'est un gage de compétence et d'expérience", juge Alain Juppé, soulignant que "le Conseil constitutionnel doit s'assurer du bon fonctionnement des pouvoirs publics, du bon équilibre entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif".

Quant à la proximité entre Richard Ferrand et Emmanuel Macron, Alain Juppé rappelle que les Sages prêtent "serment d'impartialité et de neutralité". "Il faut faire un peu confiance à la déontologie des personnes. Il y a un principe que nous respectons: le devoir d’ingratitude. Nous ne devons rien à la personne qui nous a nommés", appuie-t-il. Avant de préciser que depuis son arrivée rue de Montpensier, il n'a "jamais reçu (...) un coup de fil de Richard Ferrand sur une affaire que le Conseil constitutionnel devait traiter".

Le Conseil constitutionnel est renouvelé par tiers tous les trois ans. Parmi les neuf membres de l'instance, trois sont nommés par le président de la République, trois par la présidente de l'Assemblée nationale et trois par le président du Sénat. Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher ont donc eux aussi proposé une nomination: l'ex-députée MoDem et ex-magistrate Laurence Vichnievsky pour la première, le sénateur Les Républicains Philippe Bas pour le second.

Ces nominations doivent désormais être validées par le Parlement lors d'auditions parlementaires prévues mercredi 19 février. Laurence Vichnievsky sera auditionnée par la Commission des Lois du Palais Bourbon, Philippe Bas par celle du Palais du Luxembourg. Pour bloquer les nominations, les opposants doivent rassembler 3/5e des voix des commissionaires. Richard Ferrand devra, lui, passer devant les deux chambres du Parlemement. Avec une issue incertaine pour l'ancien socialiste, dont le camp n'est pas en position de force, ni à l'Assemblée, ni au Sénat.

Baptiste Farge