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Condamnation de Nicolas Sarkozy: Éric Dupond-Moretti estime que "c'est pas parce qu'un juge a des opinions politiques qu'il est pourri"

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L'ancien ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti s'est exprimé sur BFMTV ce dimanche 28 septembre au sujet des critiques sur la condamnation de Nicolas Sarkozy à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs.

Ancien garde des Sceaux et avocat, Éric Dupond-Moretti s'est exprimé ce dimanche 28 septembre sur BFMTV à propos des nombreuses attaques contre la justice après la condamnation de Nicolas Sarkozy à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs.

Il a notamment réagi aux propos tenus plus tôt sur BFMTV par Marion Maréchal, qui a dénoncé une "association de malfaisants entre Mediapart et les magistrats".

"Je ne sais pas si ces témoins-là ont lu le jugement. S'ils ont lu un procès-verbal du dossier qui fait plusieurs centaines de milliers de pages. (...) Alors, quand on avance des choses de cette nature et qu'on le fait de cette façon, on apporte la preuve, de la haine, du complot, de l'association non pas de malfaiteurs mais de malfaisants dont [elle] parle", a-t-il asséné.

Une charge contre Marine Le Pen

Éric Dupond-Moretti s'en est également pris à Marine Le Pen, qui s'est aussi émue de la condamnation de l'ancien chef de l'État et de la "généralisation de l'exécution provisoire". La présidente du groupe RN à l'Assemblée nationale voit sa participation à l'élection présidentielle compromise par sa condamnation à une peine de prison et d'inéligibilité avec exécution immédiate.

"Voilà des gens qui aspirent aux plus hautes fonctions et qui ne respectent en rien l'autorité judiciaire, qui garantit quand même, l'État de droit dans notre pays. Et l'État de droit, ce n'est pas des règles évanescentes, c'est ce qui nous protège de l'arbitraire", a-t-il ajouté.

Pour l'ancien ministre de la Justice, ces critiques ont également des répercussions graves. "Ça aboutit à ce qu'une magistrate de l'ordre judiciaire de notre pays soit menacée de mort", s'est-il ému. Deux enquêtes "distinctes" ont été ouvertes à la suite de "messages menaçants" visant la présidente du tribunal.

Des réserves sur l'exécution provisoire

En dépit de ses propos contre Marine Le Pen, l'ex-garde des Sceaux partage ses doutes sur l'exécution provisoire. "C'est le législateur qui a permis au juge de décerner un mandat de dépôt, et de décerner un mandat de dépôt différé avec exécution provisoire. Ce n'est pas la justice qui a fait ça. Quels sont les députés qui ont voté ce texte? Je n'aurais pas soutenu l'exécution provisoire parce que je trouve que ça vient entraver le bénéfice de la présomption d'innocence".

D'après un rapport du ministère de la Justice, 58% des peines d'emprisonnement ferme prononcées par les tribunaux correctionnels envers des majeurs l'ont été avec exécution immédiate.

Les juges et leurs opinions politiques

Si Éric Dupond-Moretti a lui-même exprimé des griefs contre la magistrature, il a répondu aux soupçons du clan de Nicolas Sarkozy à l'endroit de la présidente du tribunal, qui aurait participé à une manifestation en 2011 contre l'ancien président.

"Ce n'est pas parce qu'un magistrat a des opinions politiques qu'il est un pourri. Le grand magistrat, c'est celui qui sait faire la part des choses. Et moi, j'affirme que la grande majorité des magistrats savent faire la part des choses", a-t-il poursuivi.

L'avocat de formation s'est élevé contre "la mode" de la "contestation de tout ce qui est État de droit", citant les attaques contre le judiciaire mais aussi le Conseil constitutionnel ou le Conseil d'État. "Si on a la preuve qu'un juge envoie un homme en prison pour 5 ans (...) à raison de la haine qui est la sienne, alors on utilise tous les recours contre ce juge".

Par ailleurs, il a relevé que les avocats n'avaient pas demandé à ce que la magistrate se déporte du procès, alors qu'il s'agit d'un recours offert aux justiciables: la requête en suspicion légitime.

Florent Bascoul