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Politique

Comment le débat sur l'immigration est monté en tension depuis le début du quinquennat Macron

Discours clé d'Emmanuel Macron à Orléans le 27 juillet 2019 lors duquel il expose sa politique face à la crise des migrants

Discours clé d'Emmanuel Macron à Orléans le 27 juillet 2019 lors duquel il expose sa politique face à la crise des migrants - Michel Euler, POOL/AFP/Archives

Le débat sur l'immigration s'ouvre ce lundi à l'Assemblée nationale. Un sujet qui met la majorité sous tension.

Attention, sujet sensible. L'Assemblée nationale va débattre ce lundi 7 octobre du thème de l'immigration, comme voulu par Emmanuel Macron. C'est un sujet qui divise jusque dans la majorité LaRem. Politiquement, c'est une thématique qui met le chef de l'Etat en face-à-face avec le Rassemblement national, à quelques mois des élections municipales. 

Discret sur le sujet lorsqu'il était candidat à la présidentielle avant son élection en mai 2017, Emmanuel Macron fixe désormais "une priorité absolue, l'intégration", face à la ligne anti-immigration de Marine Le Pen. Il veut aussi "une France qui assume sa juste part dans l'accueil des réfugiés tout en reconduisant plus efficacement à la frontière ceux qui ne sont pas acceptés".

Ces dernières semaines, le sujet est revenu au premier plan. De l'initiative même du président de la République. Au début de son quinquennat, dans un discours à Orléans en juillet 2017, le président exposait une politique ambitieuse face à la crise des migrants: disparition des campements de rue dès l'année suivante, demandes d'asile examinées directement en Afrique.

Premières tensions avec la loi asile-immigration

En septembre 2017, Emmanuel Macron prend le cap de la fermeté pour la future loi asile et immigration. "Nous reconduisons beaucoup trop peu", assure-t-il alors. Portée par le ministre de l'Intérieur d'alors Gérard Collomb, elle vise, dans un subtil équilibre entre "humanité" et "efficacité", à réduire à six mois les délais d'instruction de la demande d'asile et à faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés.

Mais son examen à l'Assemblée nationale est une épreuve pour la majorité LaRem-MoDem, qui se crispe pour la première fois. Quatorze "marcheurs" s'abstiennent en première lecture au printemps 2018 à l'Assemblée, et un vote contre. 

Des objectifs annuels? 

En janvier 2019, dans sa "lettre aux Français", en pleine crise des "gilets jaunes", Emmanuel Macron remet le sujet sur la table. Il provoque la polémique en interrogeant les Français sur l'opportunité d'"objectifs annuels" d'immigration, idée proche des quotas, marqués à droite.

A l'issue en avril du grand débat national, et bien que le sujet y soit apparu en retrait, le chef de l'Etat annonce qu'il souhaite un débat annuel au Parlement sur la politique migratoire. "Nous devons profondément refonder notre politique de développement et notre politique migratoire", soutient-il, évoquant une possible refonte de l'espace Schengen. Il ne remet pas sur la table le sujet des quotas.

Le 16 septembre dernier, Emmanuel Macron appelle majorité et gouvernement à la fermeté sur le détournement du droit d'asile. Il entend alors éviter de virer en un "parti bourgeois" qui ignorerait l'opinion de classes populaires ayant "migré vers l'extrême droite".

Un discours comparé à celui "d'un responsable du Front national"

C'est un nouvel objet de crispation dans les rangs de la majorité. Certains souhaitent attendre les effets de la loi Collomb avant toute nouvelle décision. Pas d'"hystérisation", plaide aussi une partie de l'aile gauche, qui rejette toute remise en cause notamment de l'Aide médicale d'Etat (AME, pour les étrangers en situation irrégulière). Parmi eux, Delphine Bagarry compare le discours d'Emmanuel Macron à celui "d'un responsable du Front national", ce qui lui vaut un rappel à l'ordre de son parti. 

La majorité doit alors déminer les tensions en son sein. Les responsables de la majorité exhortent au "rassemblement" des troupes. Pour cela, sont montés rapidement des rendez-vous place Beauvau et à Matignon avec des débat à huis clos du groupe LREM avec le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur. La parole est donnée à toutes les sensibilités et l'approche interministérielle est privilégiée pour rassurer.

Emmanuel Macron répète le 26 septembre que "pour continuer à accueillir tout le monde dignement, on ne doit pas être un pays trop attractif", en évoquant notamment une évaluation du panier de soins de l'AME.

Ivan Valerio, avec AFP