C’est démontré : l’austérité est une erreur de calcul !

Hervé Gattegno - -
Chacun jugera si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle : deux éminents professeurs de Harvard, anciens du FMI, ont démontré en 2010 que les pays les plus endettés sont ceux où la croissance est la plus faible. D’où ce théorème : pour relancer l’économie, la priorité doit aller au désendettement des Etats. Nous savons maintenant qu’en fait, les deux savants se sont trompés dans leurs calculs. Ce sont d’autres experts, d’une autre université, qui l’ont découvert en refaisant les totaux. Ce qui montre : 1. que les économistes se méfient les uns des autres. 2. Qu’on devrait peut-être se méfier nous aussi.
Est-ce que cette erreur mathématique peut réellement avoir des conséquences politiques ?
Ce serait logique. La fameuse étude a été brandie par les apôtres de la rigueur comme une des tables de la loi. Le secrétaire US au Trésor, le commissaire européen à l’Economie, des dizaines d’experts (ou supposés tels) s’y sont référé pour plaider l’austérité. En France, le texte était cité en introduction du budget 2010 du gouvernement Fillon – et le désendettement à marche forcée est l’un des (rares) points sur lesquels François Hollande s’inscrit dans la continuité de Nicolas Sarkozy… On sait pourtant que l’austérité est un sujet qui divise les partis, surtout à gauche où certains disent depuis longtemps que la rigueur budgétaire est mauvais calcul politique. Savoir qu’il repose sur un mauvais calcul mathématique ne va pas les dissuader…
Donc la découverte de cette faute de calcul donnerait raison à tous ceux qui préconisent la relance plutôt que la rigueur… Est-ce qu’on peut aller aussi loin ?
Les calculs, même vrais, laissent toujours une place aux interprétations idéologiques. Cela dit, le FMI a déjà avoué qu’une fausse équation arithmétique l’avait conduit à minorer l’impact des restrictions budgétaires sur l’économie des pays. En clair, les grands comptables de Washington ont compris ce que les manifestants grecs hurlent depuis trois ans : les cures d’austérité imposées aux peuples d’Europe sont comme les saignées des médecins de Molière – des remèdes qui vous tuent plus sûrement que le mal. A présent, on sait en plus que les chiffres qui justifiaient le tour de vis ne valaient pas un clou…
Comment se fait-il qu’il ait fallu attendre ces contre-expertises pour arriver à ces constatations ?
C’est le plus troublant de l’histoire. On finit par oublier que ces alignements de chiffres représentent le travail d’êtres humains, les marchandises qu’ils produisent, celles qu’ils achètent… Dans la vie réelle, il n’y a pas un pays où l’austérité ait fait reculer le chômage, augmenté le pouvoir d’achat et fait repartir l’économie. Mais les chiffres disaient le contraire… C’est comme si on refusait d’ouvrir la fenêtre dans une pièce où l’on étouffe parce que le thermomètre indique qu’il fait froid.
A part cela, le FMI annonce la récession en France et dans la zone euro. Avant de s’affoler, on devrait peut-être refaire les additions…
Ecoutez ici le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce vendredi 19 mars.