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Politique

Ayrault est (peut-être) socialiste, mais est-il (encore) Premier ministre ?

Hervé Gattegno

Hervé Gattegno - -

Contrairement à F. Hollande, qui a semblé prendre ses distances avec le PS et la gauche dans son interview télévisée, JM. Ayrault se revendique (dans le JDD d’hier) comme « 1er ministre socialiste ». Il est peut-être socialiste, mais est-il encore premier ministre ? On croit deviner la réponse…

Tout le monde a relevé que François Hollande n’avait pas cité Jean-Marc Ayrault en 1H15 d’émission, jeudi dernier. On ne sait pas s’il a fait exprès (à l’Elysée et au PS, les avis divergent) mais ça ne sert pas le prestige du 1er ministre. L’interview du JDD servait à rétablir l’idée d’une répartition des rôles entre l’Elysée et Matignon. Mais que JM. Ayrault en fasse des tonnes sur sa proximité avec F. Hollande et sur son « identité » de gauche ne change rien à son affaiblissement : sa politique est impopulaire, sa majorité inquiète, son gouvernement indiscipliné. En résumé : il a un problème d’austérité et un problème d’autorité.

Est-ce que c’est pour y remédier que le premier ministre vient de réorganiser son équipe de communication ? Ça peut avoir un effet ?

L’annoncer juste après l’émission de F. Hollande montre surtout qu’il y avait urgence – c’est de la communication… de crise ! Puisque même F. Hollande ne le cite plus, JM. Ayrault veut faire parler de lui (au sens propre). En réalité, c’est le retour aux fondements de la Ve République : un 1er ministre utile mais réduit… aux utilités. Il précise le calendrier, annonce des concertations – il fait le service après-vente. L’existence politique d’Ayrault ne peut guère aller très au-delà car à la différence de ses prédécesseurs, c’est un 1er ministre moins populaire (ou encore plus impopulaire) que le président … Il devrait être un poids lourd et il est déjà presque un poids mort.

Un livre sur l’affaire des hauts fourneaux de Florange raconte que JM. Ayrault s’est presque fait insulter par A. Montebourg durant cette crise. Est-ce que c’est un épisode qui a nui à son autorité ?

Ça ne fait aucun doute. D’autant que JM. Ayrault est allé très loin, dans cette affaire, pour humilier son ministre – en le désavouant, en l’écartant des négociations avec Mittal. F. Hollande a refusé la démission de Montebourg, ce que Montebourg a considéré comme un demi-désaveu de Matignon… On en est là. Au-delà du conflit personnel, il y a un affrontement politique qui n’est pas résolu. Et un problème fonctionnel à Matignon que d’autres ministres pointent aussi. Montebourg n’est pas le seul à reprocher à Ayrault de « gérer la France comme le conseil municipal de Nantes » – certains rappellent même que Nantes est une ville très endettée…

JM. Ayrault a aussi confirmé qu’A. Montebourg lui aurait dit : « Tu fais chier la France entière avec ton aéroport de Notre-Dame-des-Landes ». On ne parle plus de ce projet. Où en est-il ?

Comme toujours dans ces cas-là, une commission a été créée pour entendre partisans et opposants. Elle doit rendre son rapport d’ici peu mais son président a déjà relativisé dans la presse l’intérêt du projet. Comme c’est un casus belli avec les Verts et que l’heure n’est pas aux grandes dépenses, il semble bien que le projet ait du plomb dans l’aile – ce qui n’est pas l’idéal pour un aéroport. D’ailleurs, F. Hollande a demandé à JM. Ayrault de s’éloigner un peu de ce dossier. Sans doute moins pour l’empêcher de décoller que pour lui éviter un crash…

Ecoutez ici le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce lundi 1er avril.

Hervé Gattegno