Affaire Théo: l'exécutif craint une escalade de la violence en banlieue

Avec le spectre des émeutes de 2005 en tête l'exécutif veut éviter l'embrasement de violence. - Martin BERTRAND / AFP
L'exécutif veut montrer qu'il est mobilisé. Alors que s'accumulent les épisodes de violences en banlieue, dans le sillage de l'interpellation de Théo, qui accuse un des policiers de l'avoir violé avec sa matraque, François Hollande et Bruno Le Roux, chacun à leur manière, tentent d'éviter l'embrasement. Car douze ans après les faits, le spectre des émeutes de 2005 reste dans toutes les mémoires.
Et des parallèles peuvent vite apparaître: dans les deux cas, tout commence avec une intervention de police, qui conduit en 2005 à la mort de deux jeunes hommes âgés de 17 et 15 ans, Zyed Benna et Bouna Traore, et en 2017 à l'hospitalisation et l'opération de Théo, âgé de 22 ans. Dans les deux cas, l'attitude de la police est mise en cause, et dans les deux cas également, les violences s'exportent rapidement en dehors de la ville où ont eu lieu les événements: Clichy-sous-Bois en 2005, Aulnay-sous-Bois aujourd'hui.
Hollande évoque le "respect dû à ces jeunes"
"Ni la politique policière ni les niveaux d'hostilité, très élevés, dans les quartiers défavorisés" n'ont changé de 2005 à 2017, estime en outre le politologue Sébastian Roché, interrogé ce mardi dans Le Figaro. "Aujourd'hui, on est dans la même situation que lors de l'affaire Zyed et Bouna. On prend la même direction", expliquait aussi ce policier de l'Essonne interrogé lundi par BFMTV.com. Les semaines à venir diront si le parallèle s'arrête là, mais pour éviter une nouvelle crise similaire, le sommet de l'Etat tente de donner une réponse politique à ces violences.
Lors d'un déplacement à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, ce mardi, François Hollande a souhaité "que la justice passe", tout en affirmant ne pas accepter "la casse" et refuser "toutes les provocations". Une visite prévue de longue date, avant l'interpellation de Théo, sur le thème de l'emploi des jeunes. Mais une visite que de nombreux habitants ont jugé tardive ou insuffisante, à l'image de cette habitante qui a interpellé le président sur son passage au cri de "police, violeurs, assassins", réclamant la "justice pour Théo".
Une affaire politique
"Conscient" qu'il venait en Seine-Saint-Denis "dans un moment particulier" pour ce déplacement consacré à l'insertion professionnelle des jeunes, François Hollande a aussi longuement plaidé en faveur du "respect", soulignant qu'il "n'y a pas de vie en commun, s'il n'y a pas de respect".
"Le respect, c'est celui qui est dû à ces jeunes quand ils sont contrôlés, lorsqu'ils sont eux-mêmes confrontés à des situations de violence", a-t-il enchaîné, alors qu'il s'exprimait à moins de 10 kilomètres de la cité des 3.000 d'Aulnay, où a eu lieu l'interpellation de Théo.
Une des différences avec 2005 réside cependant dans le fait que l'affaire a pris dès le début un tournant politique. Peut-être à cause du calendrier, car les faits se sont produits à moins de trois mois de la présidentielle. Mais peut-être aussi précisément parce que François Hollande notamment, avait en tête les émeutes d'il y a douze ans. Il a donc rendu rapidement visite au jeune homme sur son lit d'hôpital.
Le Roux saisit l'IGPN après un nouveau témoignage
Ce mardi, Bruno Le Roux accusé par la droite et l'extrême-droite de ne pas réagir suffisamment aux événements, était en déplacement lui aussi, à Sarcelles. Le ministre de l'Intérieur a été critiqué notamment pour avoir autorisé la manifestation de soutien à Théo qui a dégénéré samedi à Bobigny. Un choix qu'il a pourtant assumé. "Quand on a une colère à manifester, un avis à donner, dans notre démocratie, on peut manifester", a-t-il affirmé sur RTL. Sans doute un autre moyen de calmer le jeu, car rien ne dit que l'interdiction de ce rassemblement n'aurait permis d'éviter les violences.
En milieu de journée, mardi, le ministre de l'Intérieur a saisi l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) après de nouvelles accusations de violences visant un des policiers mis en examen pour l'interpellation de Théo. Dans un témoignage à l'Obs, Mohamed K., un ami de Théo, raconte avoir été passé à tabac une semaine avant ce dernier par des policiers dont l'un a participé au viol présumé de Theo lors de son interpellation. Une réaction rapide, alors que l'article est paru mardi matin sur le site de l'Obs.