Villiers-le-Bel: le policier "pensait rouler à allure normale"

La salle d'audience du tribunal de Pontoise, jeudi matin avant l'audience. - -
Cinq ans et demi plus tard, le temps a eu raison des passions. C’est dans un calme grave que le tribunal correctionnel de Pontoise a décortiqué jusqu’aux moindres détails, jeudi matin, les circonstances de l’accident qui avait embrasé Villiers-le-Bel deux jours durant, fin 2007. Sur le banc des prévenus, Franck V., le conducteur du véhicule de police entré en collision avec la moto de Mouhsim et Lakamy, les deux ados tués dans l’accident.
Jeudi matin, le tribunal a examiné jusqu’au moindre détail les circonstances dans lesquelles Franck V. et trois de ses collègues étaient arrivés, le 25 novembre 2007, au carrefour où leur voiture est entrée en collision avec les deux jeunes.
"La BAC intervenait sur un vol de GPS et il s’agissait seulement pour nous de nous rapprocher, au cas où, se souvient le prévenu, 36 ans, coupe courte, veste sombre et chemise blanche. On avançait à allure patrouille, calmement. On ne savait pas trop où on allait." Dans la voiture, l’ambiance était "bon enfant". "On discutait entre nous, de tout et de rien."
"Un gars qui a manqué de pot"
L’homme à la barre est calme, précis. Il parait aussi harassé, prématurément vieilli. En tant que conducteur, il est le seul de ses quatre collègues à avoir été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour "homicides involontaires". L’officier de permanence au commissariat de Sarcelles ce jour-là, appelé à témoigner, décrit un "gars calme, pondéré" qui a simplement "manqué de pot".
Pour Franck V., c’était une journée banale. Un dimanche après-midi de patrouille à Villiers-le-Bel, une des trois villes de son secteur, sans mission précise. "On est arrivé dans la rue Louise-Michel, je la connaissais un peu. Au carrefour, j’ai regardé à droite voir si personne n’arrivait et quand je me suis retourné, j’ai juste vu la moto arriver, et le choc." Le deux-roues, il ne l’a pas vu arriver, ne l’a pas entendu. La présidente s’étonne: "il y avait du bruit dans le véhicule?" "Pas plus que ça. La radio ne fonctionnait pas."
"J'avais l'impression de rouler à 40, 50 km/h"
Il jure n’avoir pas eu conscience, non plus, d’avoir accéléré, comme le rapport d’expertise l’a montré par la suite. Au moment du choc, dans cette "petite rue de centre-ville", son véhicule roulait à 64 km/h. "Pour moi, je roulais à allure patrouille", indique-t-il. "C’est-à-dire?", s’enquiert la présidente. "J’avais l’impression de rouler à 40, 50 km/heures." "Mais vous n’avez pas ralenti au carrefour, malgré la faible visibilité?" "Non."
Après l’accident, lui et ses trois collègues ont été évacués ensemble. La présidente s’enquiert de savoir s’ils ont confronté leurs versions à ce moment-là, car les premiers éléments de l’enquête avaient dégagé les policiers de toute responsabilité. "Non, j’étais sous le choc. Je me souviens seulement avoir dit à un collègue: ils arrivaient bien de gauche? et lui de me répondre: oui, oui."
L’audience doit se poursuivre jeudi après-midi, avec les rapports d’expertise.
(Dessins : Mathilde Tournier - BFMTV)
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