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Police-Justice

"Une peine injuste": un couple qui a perdu son enfant à naître dans un accident de la route réagit au procès Palmade

Angélique a perdu l'enfant qu'elle portait sur le chemin de la maternité après avoir été percuté par un véhicule à contre sens.

Angélique a perdu l'enfant qu'elle portait sur le chemin de la maternité après avoir été percuté par un véhicule à contre sens. - BFMTV

Angélique et Valentin se battent pour faire reconnaître l'homicide de leur enfant à naître après un accident de la route où la jeune femme enceinte a perdu son enfant sur le chemin de la maternité. Ils dénoncent le refus de Pierre Palmade de comparaître pour "homicide involontaire".

Des affaires Palmade, la France en compte chaque année. Moins médiatisées, elles n’en demeurent pas moins tout aussi tragiques. Angélique et Valentin ont perdu leur enfant à naître dans un accident de la route le 28 juillet 2023 à Douai (Nord). Elle s’appelait Jade.

Ce jour-là, une voiture à contresens percute le véhicule du couple en route vers la maternité pour accueillir leur fille. Angélique et Valentin sont grièvement blessés. Jade meurt in utero. Aujourd’hui, ils se battent pour que leur fille soit reconnue en tant que personne et non pas enfant à naître; pour qu’un procès pour "homicide involontaire" se tienne.

"Une peine injuste"

Angélique et Valentin ont suivi, étape par étape, le procès de Pierre Palmade. Ce mercredi 20 novembre, l’humoriste a été reconnu coupable de "blessures involontaires" et condamné à cinq ans de prison, dont deux ferme, après le grave accident de la route qu’il a causé en février 2023, en conduisant sous l'empire de stupéfiants, soit cinq mois avant l’accident d’Angélique et Valentin.

"Cette peine est injuste", souffle Angélique auprès de BFMTV.com. "Bien évidemment que ce n’est pas assez, sachant qu’il a refusé d’être jugé pour 'homicide involontaire'. Sincèrement, ce n’est pas assez, c’est incompréhensible, ce n’est pas normal."

Mila, une jeune femme enceinte au moment de l’accident avec la voiture de Pierre Palmade, a elle aussi perdu l’enfant qu’elle portait après la collision. La juge d’instruction n’a pas renvoyé l’humoriste pour "homicide involontaire" devant un tribunal. Il a d’ailleurs refusé de comparaître librement pour ce délit à son audience.

"Il aurait dû assumer ces faits, c'est la moindre des choses qu'il aurait pu faire pour les parents, mais forcément, c’était sûr qu’il n’allait pas le faire", analyse Valentin pour BFMTV.com.

"C'est bien de dire 'je m'excuse', mais des excuses, dans ces moment-là, on s'en fiche. On veut qu'il soit jugé pour ce qu'il a commis. Pour moi, il n'a pas été jugé pour ce qu'il a fait", poursuit le jeune homme.

De leur côté, Valentin et Angélique ont déposé plainte pour "homicide involontaire" auprès du parquet d’Arras après leur accident de la route. "La plainte a été classée", explique Antoine Régley, l’avocat du couple spécialisé dans le droit routier. La justice a suivi la jurisprudence de la Cour de cassation. Mila, dans l’affaire Pierre Palmade, s’est heurtée à cette même jurisprudence.

À l'heure actuelle, la Cour de cassation, qui s'est prononcée à plusieurs reprises sur le statut pénal d'un foetus in utero au début des années 2000, est claire: en droit pénal, le fœtus n'existe pas, sa mort ne peut donc être reprochée à quiconque. Le bébé que portait Angélique n’a pas respiré. Jade n’est donc pas une personne humaine et vivante selon la jurisprudence de la Cour de cassation qui fait une interprétation stricte du Code pénal qui dit que "la mort d’autrui constitue un homicide involontaire". Ainsi, la victime doit être vivante au moment de l’accident.

Après le classement de la plainte déposé par Angélique et Valentin, "j’ai déposé plainte avec constitution de partie civile devant la juge d’instruction qui l'a accueillie”, indique Me Antoine Régley. "Elle a décidé d’ouvrir l’instruction. À la fin, qu’est-ce qu’elle en fera? Je crains qu’elle nous parle de la jurisprudence de la Cour de cassation, l’enfant n’ayant pas respiré."

Pas d'effet médiatique

"L’affaire de Pierre Palmade était plus médiatisée, on s’est dit que ça allait permettre de lancer un débat pour l’ensemble de ces bébés, car je ne qualifierai pas ces bébés de fœtus", souffle Angélique, gagnée par l’émotion. "Et finalement non. On est extrêmement déçus."

Angélique espère encore que les choses avancent, qu’un débat s’ouvre avec son histoire, "même si ce n’est pas Pierre Palmade qui nous a fauchés". Elle veut le faire pour "changer les choses, pour Jade et pour tous ces autres enfants".

"On fera toujours tout, on ne s’arrêtera jamais", prévient la mère de famille. "Jusqu’à mon dernier souffle je me battrais pour Jade, pour notre princesse, c’est notre fille, mais aussi pour tous ces autres parents et ces autres enfants qui ont subi cette injustice, et ceux qui la vivront."

Le procès de Pierre Palmade, Valentin l’a vécu comme "une avant-première", un aperçu de ce qui les attend avec Angélique. S’il appréhende l'audience qui s’ouvrira tôt au tard, il "garde quand même espoir".

"Je me dis qu’Angélique était quand même à 40 semaines +3 jours. On était vraiment sur le terme, terme, terme", poursuit le Douaisien. "Peut-être que ça pourrait faire pencher la balance..."

Jade "faisait plus de trois kilos", poursuit Angélique. "C'est un bébé comme tous les bébés (...) je ne pense pas que l’on puisse dire qu’on n’a pas perdu d’enfant", conclut la Douaisienne. "C’est sous-estimer ce que l’on peut ressentir."

Charlotte Lesage