Procès des attentats de Bruxelles: comment sont exécutées les peines quand on est condamné dans deux pays?

Neuf hommes sont jugés jusqu'à l'été par la cour d'assises de Bruxelles pour les attentats du 22 mars 2016. - Eric Lalmand/Belga
Salah Abdeslam, Mohamed Abrini, Sofien Ayari, Ali El Haddad Asufi et Osama Krayem sont confrontés pour la seconde fois à la justice pour des faits terroristes. Après avoir été condamnés en juin dernier par la cour d'assises spéciale de Paris pour les attaques du 13 novembre 2015, ces cinq hommes comparaissent devant la cour d'assises à Bruxelles pour les attentats commis le 22 mars 2016 à l'aéroport de Zaventem et dans le métro de la capitale belge.
Lors de ce nouveau procès qui se déroule de l'autre côté de la frontière pour leur participation et leur rôle dans la préparation des attentats qui ont endeuillé la Belgique en 2016, ces cinq hommes encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
Ils sont poursuivis d'assassinat dans un contexte terroriste, de tentative d'assassinat dans un contexte terroriste, de participation aux activités d'un groupe terroriste. Quatre autres personnes sont jugées à leurs côtés, tous encourent la plus lourde peine à l'exception d'un seul accusé.
Des peines qui se cumulent
Le 29 juin dernier, la cour d'assises spéciale de Paris a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité réelle Salah Abdeslam le considérant comme le co-auteur des attentats du 13-Novembre.
Mohamed Abrini a également écopé de la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans. Période au terme de laquelle il pourra déposer une demande de libération conditionnelle, sans que celle-ci ne soit automatiquement acceptée.
Osama Krayem et Sofien Ayari ont été condamnés à 30 ans de réclusion criminelle, Ali El Haddad Asufi à 10 ans de prison.
Ces peines prononcées par la justice française sont aujourd'hui définitives, alors qu'aucun des accusés dans le procès des attentats du 13-Novembre n'a fait appel de sa condamnation. Si des peines sont prononcées par la justice belge d'ici l'été, elles vont alors "se cumuler" avec les peines françaises, explique à BFMTV.com une spécialiste du droit français et belge. Autrement dit, lorsque les accusés auront purgé l'intégralité de leur peine prononcée par la justice française, ils devront purger celle prononcée en Belgique s'ils sont condamnés.
"La confusion des peines existe aussi en Belgique mais elle ne s'applique que pour des infractions qui sont commises dans un même contexte et dans une même unité d'intention délictuelle", poursuit la spécialiste.
La cour d'assises spéciale de Paris avait bien pris garde de juger les faits précédant les attentats commis en France, les attaques, et les faits qui se sont produits après sur le sol français et ceux concernant la cavale de Salah Abdeslam. Elle n'avait alors pas débordé sur ce qui s'est produit après le 13 novembre 2015 en Belgique et notamment dans les planques occupées par la cellule terroriste jusqu'à l'arrestation du membre du commando du 13-Novembre qui a précipité le passage à l'acte des jihadistes.
Cette précaution était d'autant plus déterminante que tout citoyen ne peut être jugé deux fois pour les mêmes faits. Il s'agit d'un principe de non bis in idem, existant dans le droit français, et consacré par l'article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
"Conformément à l'article 50, la règle 'non bis in idem' ne s'applique pas seulement à l'intérieur de la juridiction d'un même État, mais aussi entre les juridictions de plusieurs États membres", est-il mentionné dans cette charte.
Des condamnations prises en compte
Lors de ce procès dont les débats se sont ouverts ce lundi, les regards seront tournés vers Mohamed Abrini et Osama Krayem. Le premier a en effet été filmé dans l'aéroport de Zaventem poussant un chariot à bagages aux côtés des deux kamikazes, le deuxième, qui a refusé de se lever et de s'exprimer lors de la première journée du procès à Bruxelles, en sortant du métro bruxellois portant un gilet explosif.
Ont-ils renoncé à passer à l'acte? D'autres attaques étaient-elle envisagées? Avant de prendre leur décision concernant la culpabilité de ces hommes, les 12 jurés citoyens et les trois magistrats professionnels pourront prendre en compte la condamnation prononcée par la France.
"Suivant l’article 99 bis du Code pénal belge, les condamnations prononcées par les juridictions pénales d’un autre Etat membre de l’Union européenne sont prises en compte mais le juge belge ne peut s’y référer exclusivement", analyse-t-on à la cour d'appel de Bruxelles.
Reste qu'en droit français comme en droit belge, il existe toutefois une prescription pour l'exécution des peines, c'est-à-dire un délai à respecter pour faire exécuter la peine. En France, il est de 30 ans pour les crimes terroristes, en Belgique de 20 ans.