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Prévention, formation... Par quoi passera le changement de la doctrine du maintien de l'ordre?

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Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a annoncé, mardi matin sur notre antenne, être "prêt à revoir la totalité de l'ordre public en France".

Après un récent changement de doctrine du maintien de l'ordre, intervenu en plein mouvement des gilets jaunes, Christophe Castaner a annoncé, mardi matin sur notre antenne être de nouveau "prêt à revoir la totalité de l'ordre public en France pour trouver les meilleures solutions"

Si le ministre de l'Intérieur n'a pas donné de pistes concrètes, mis à part vouloir "des gens mieux formés à l’usage du LBD et à d’autres types d’armes" dans les manifestations, Eric Delbecque, spécialiste des questions de sécurité intérieure, a indiqué mardi sur notre antenne que "l'on ne part pas de rien".

"Cela fait des années que les forces de l'ordre réfléchissent à une évolution nécessaire du maintien du l'ordre. On peut donc piocher dans des idées qui ont été données aussi bien par la gendarmerie que par la police", a-t-il précisé. 
  • Un travail de prévention

Parmi ces idées, "un travail sur la prévention, au cours même de la manifestation, pour faciliter les interventions" pourrait être envisagé, afin de pouvoir également "établir un dialogue plus clair entre les forces de l'ordre et les manifestants", a souligné le spécialiste. 

"La communication à l'instant T dans les manifestations doit évoluer, confirme à BFMTV.com Grégory Joron, secrétaire national CRS du syndicat Unité SGP-Police. Il faut faire de la pédagogie, expliquer aux manifestants pourquoi on emploie la force et où elle va être employée, leur indiquer les points chauds en cours pour qu'ils n'y aillent pas. Ces actions permettront de sensibiliser les citoyens et de faire le tri entre ceux qui veulent défiler normalement et ceux qui veulent en découdre". 

Afin de faire baisser le nombre de blessés, autant du côté des manifestants que des forces de l'ordre, il n'existe pas "de solution unique", a ajouté Eric Delbecque.

S'appuyant sur les exemples de manifestations des gilets jaunes, il explique qu'un "travail de filtrage, d'arrestation de gens dont on sait qu'ils vont être dangereux" en amont des manifestations peut permettre de "diminuer le nombre de blessés". Ces mesures doivent devenir "une culture, une habitude" car elles ne faisaient pas parties "jusqu'à présent de notre doctrine". 
  • Une meilleure formation 
Les policiers doivent également "être mieux formés", souligne Grégory Joron. "Lors des dernières grandes manifestations, on a envoyé des fonctionnaires de police qui n'étaient pas formés à la gestion de foule. [...] Aujourd'hui, tous les fonctionnaires devraient être sensibilisés à la gestion du stress, des moyens...", précise-t-il. 

Pour le membre du syndicat Unité SGP-Police, il "faudrait également mettre en places des exercices en mélangeant les forces et les différentes directions pour créer du lien dans la chaîne opérationnelle et la chaîne de commandement". 

  • Recours à la police judiciaire

En plus des gendarmes mobiles et des CRS, Driss Aït Youssef, président de l'Institut Vinci et spécialiste des questions de sécurité, affirme à BFMTV.com qu'il faut continuer à recourir à la police judiciaire, à savoir les brigades de répression de l’action violente (BRAV), lancées en mars dernier. Lors des manifestations, "elles permettent d'interpeller les individus violents dès le premier accrochage et d'éviter que des black blocs se forment", explique-t-il.

  • Une décentralisation des prises de décision

Au cours d'une manifestation violente, Grégory Joron souligne également qu'il peut être important de "décentraliser la prise de décisions" car "si l'on reste sur le schéma d'ordres qui viennent de la salle de direction, un temps de latence coûteux intervient entre les faits constatés sur le terrain et la décision de la salle". 

  • Réunion d'un groupe d'experts

Mardi matin, Christophe Castaner a rappelé avoir mis en place "un groupe d'experts avec des anciens magistrats, des policiers, des journalistes, des spécialistes de ces questions pour qu'ils nous éclairent".

Une quinzaine d'experts français et étrangers du maintien de l'ordre ont ainsi planché, en juin dernier, place Beauvau, sur une réflexion plus globale sur la stratégie et la méthode adoptée par les CRS et les gendarmes mobiles lors des manifestations.

"La police, que ce soit pour le maintien de l'ordre ou la lutte contre le terrorisme, par exemple, est en constante évolution. Cette réflexion est tant pour les techniques que pour l'opérationnel. C'est aussi une manière de penser la foule avec une dimension sociologique, ethnologique, par rapport à des modes de rassemblement qui changent", déclarait à BFMTV.com Jean-Michel Fauvergue, député de Seine-et-Marne et ancien chef du Raid, qui avait participé à ce séminaire.

Le ministre de l'Intérieur a expliqué qu'il allait réunir de nouveau le groupe d'experts "dans les semaines qui viennent" et qu'il "présenterai[t] un schéma national avec Laurent Nuñez".

Clément Boutin