BFMTV
Police-Justice

Port-Royal : ouverture de 3 enquêtes sur la mort d'un bébé in utero

La ministre de la Santé, Marisol Touraine

La ministre de la Santé, Marisol Touraine - -

Le parquet a ouvert une triple enquête, administrative, judiciaire et médicale, pour éclaircir les circonstances du décès d'un bébé à Paris, mort dans l'utérus de sa mère. Faute de place pour la maman, la maternité Port-Royal l'avait renvoyée chez elle.

Une triple enquête - médicale, administrative et judiciaire - est menée pour éclaircir les circonstances du décès à Paris d'un bébé in-utero, imputé par les parents à la saturation de la maternité où l'accouchement devait avoir lieu. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire et la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a de son côté appelé à « une enquête exceptionnelle », administrative et médicale, pour « faire toute la lumière » sur cette affaire, assurant qu'elle « veillerait » à ce que les parents puissent connaître la vérité.
Le père et la mère de l'enfant, décédé vendredi dernier, envisagent de porter plainte contre la maternité. Selon le récit du père, rapporté par Le Parisien, son épouse et lui-même s'étaient présentés jeudi dernier à la maternité, dans le XVe arrondissement de Paris, en vue d'un rendez-vous programmé pour déclencher l'accouchement. Le personnel leur a alors expliqué ne pouvoir les prendre en charge faute de chambre disponible. Le couple est dirigé plusieurs heures plus tard, sur son insistance, vers les urgences de la maternité pour un examen. « Une sage-femme débordée qui courait de box en box est venue vers nous pour nous dire de rentrer chez nous. Pour elle, il n'y avait pas d'urgence », raconte le père, qui est pompier. Le bébé décèdera le lendemain. Son corps devrait être autopsié.

« Il y a toujours de la place »

« La sécurité pour les mamans et leurs bébés dans les maternités est pour moi une exigence absolue », souligne Marisol Touraine, disant faire « toute confiance à la direction générale de l'AP-HP et à sa commission médicale » pour mener à bien l'enquête.
Patrick Houssel, directeur des hôpitaux universitaires du groupe Paris Centre à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, dont dépend Port-Royal, a affirmé sur France Info que des lits étaient disponibles jeudi dernier à la maternité.« Il y a toujours, toujours de la place », a-t-il déclaré. « Nous pensons qu'il y avait dans cet établissement de Port-Royal des lits et c'est ce que nous sommes en train de vérifier ». « Nous voulons savoir ce qui a amené le service d'obstétrique à renvoyer cette femme à son domicile », a-t-il poursuivi. Patrick Houssel a indiqué que l'Assistance publique et le groupe hospitalier Cochin-Port-Royal avaient mis en place le jour même un groupe de travail « pour déclencher une enquête interne ». « Il y avait les effectifs normalement requis par le tableau de service, c'est-à-dire une sage-femme, une infirmière, une aide soignante, deux internes. Nous allons vérifier que ces personnes étaient bien à leur poste », a-t-il dit.
Dominique Cabrol, patron de la maternité de Port-Royal, déclare dans Le Parisien que ses équipes sont « choquées » par ce décès. « Quand nous avons examiné la patiente jeudi, au monitoring, le rythme était normal. Rien ne laissait présager qu'il y avait un risque », dit-il. Il concède que son service était ce jour-là « en saturation totale ». « On peut penser que si la jeune femme avait accouché comme prévu, le bébé serait vivant ».

« Un évènement terrible »

Pour Patrick Houssel directeur du groupe hospitalier dont dépend l'hôpital Port-Royal, il est difficile d’évacuer la responsabilité de l’établissement. « Nous ne pouvons pas dire autre chose. Il y a eu des disfonctionnements. C’est ce qui nous interpelle. Pourquoi cette femme a-t-elle été renvoyée chez elle ? Pourquoi n’a-t-elle pas été transférée dans une autre maternité. Nous voulons vérifier qu’il n’y avait pas de lit disponible à Port-Royal qui en dispose de 145. Nous voulons vraiment nous assurer qu’il n’y avait aucun lit pour cette femme. L’enchainement des circonstances rend cet évènement terrible ».

« On ne peut pas gérer un hôpital comme une entreprise »

« Ce n’est pas le premier accident depuis que cette maternité est ouverte », constate Christophe Prudhomme, porte-parole de l'Association des médecins urgentistes (AMUF) et médecin au Samu de Seine-Saint-Denis. Pour lui, ce dysfonctionnement était prévisible : « Il y a quelques mois une femme avait accouché seule dans son box, tout le personnel étant occupé ailleurs, et le bébé était tombé par terre. Heureusement cela s’était bien terminé et le bébé n’avait pas eu de traumatisme. Là, le dysfonctionnement était prévisible. On ne peut pas gérer un hôpital comme une entreprise. Un hôpital, comme Cochin – Port-Royal, une maternité qui fait 5 000 accouchement et où il est prévu de passer à 7 000, c’est ingérable et il y aura des accidents ».

Tugdual de Dieuleveult avec J. Droze et A. Perrin