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Pollution: la plainte contre X peut-elle aboutir?

Photo prise depuis le parc de St-Cloud, le 12 décembre 2013, lors d'un pic de pollution.

Photo prise depuis le parc de St-Cloud, le 12 décembre 2013, lors d'un pic de pollution. - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE

Alors que l'Ile-de-France est touchée par un pic de pollution aux particules fines depuis mercredi dernier, trois associations s'apprêtent à déposer plainte contre X mardi, pour mise en danger de la vie d'autrui. Une telle plainte peut-elle aboutir?

Trois associations s'apprêtent à déposer plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui, mardi, alors qu'un épisode de pollution aux particules touche l'Ile-de-France depuis mercredi dernier. "Les slogans et les petites manifs très gentils, ça ne suffit plus" a ainsi déclaré Nadir Saifi, vice-président d'Ecologie sans frontière sur France Info, qui révèle l'information.

Une telle plainte peut-elle aboutir? BFMTV.com a interrogé Maîtres Christian Huglo et Marie-Pierre Maître, du cabinet Huglo Lepage, spécialisé dans l'environnement.

> Cette plainte est-elle une première en France?

Non, il y en a déjà eu une, il y a dix ans, mais qui a été classée sans suite.

> Cette nouvelle plainte a-t-elle plus de chances d'aboutir?

Dans un tel dépôt de plainte, on ne peut s'en sortir sans montrer le lien de causalité entre la pollution atmosphérique et "le risque encouru, un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente". Or c'est assez compliqué, parce que cela touche les enfants et les personnes âgées. Il y a une question d'expertise qui est fondamentale. Tel que le texte est conçu, ce n'est pas si facile de démontrer que cela est dû à "la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement", selon l'article 223-1 du code pénal.

Cette plainte arrive cependant dans un contexte plus favorable que la précédente, car la jurisprudence a évolué. Aujourd'hui, elle dit qu'un règlement n'est pas forcément un décret, cela peut être un arrêté préfectoral.

Il suffit de trouver la violation d'un règlement qui est manifeste, notamment sur les particules fines. Or il y a eu une plainte contre la France devant la Cour de justice européenne, justement à propos des particules fines. C'est l'administration française qui, en ne transposant pas les directives, empêche d'obliger à un règlement. Dans ces conditions-là, on peut considérer qu'il y a une violation manifeste d'une obligation de sécurité.

> A quels autres obstacles la plainte peut-elle se heurter?

La question se pose également de la qualité pour agir des associations. Ce ne sont pas elles qui subissent le préjudice directement. Pour que la procédure réussisse, l'action devrait donc être engagée par des victimes de la pollution de l'air.

Cela ne suffit pas d'être une association qui lutte contre la pollution. Ces associations devraient se constituer pour à la fois défendre les intérêts collectifs des membres, mais également les intérêts individuels de ses membres, et compter parmi ses membres des jeunes enfants représentés par leurs parents, ou des personnes âgées.

Cette plainte est très justifiée, mais elle va se trouver en butte à des difficultés de procédure sans fin. C'est un procès très politique, qui souligne l'inaction des gouvernements successifs. Mais il ne faut pas faire un communiqué de presse, il faut faire un vrai dossier, sur la non-transposition de la directive européenne.

Magali Rangin