Pluie de critiques contre des mesures anti-Roms "stigmatisantes"

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PARIS (Reuters) - Opposition et associations tirent à boulets rouges sur les mesures visant la communauté Rom décidées par le gouvernement français, accusé de stigmatisation et de xénophobie.
A l'issue d'une réunion interministérielle mercredi à l'Elysée, le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, a demandé le démantèlement dans les trois mois d'environ 300 camps illégaux.
Il a menacé en outre de reconduites à la frontière "quasi immédiates" vers la Bulgarie ou la Roumanie les Roms "qui auraient commis des atteintes aux biens ou des fraudes".
Les associations de défense des droits de l'Homme et les gens du voyage ont fait part de leur colère et de leur désarroi.
"Où va-t-on ? Que va-t-il advenir d'un peuple chassé de tous pays ?", s'interroge dans Libération Saimir Mile, porte-parole de l'association Voix des Roms.
"Les Roms sont une proie facile", ajoute-t-il, déplorant que "les politiques menées se cantonnent à une logique répressive et les amalgames se multiplient dans la bouche des responsables".
Evoquant une "épuration ethnique", Henri Braun, avocat défendant les intérêts des communautés, menace l'Etat d'actions en justice "pour provocation à la haine raciale".
Dans Le Parisien, l'actrice Fanny Ardant évoque une "peur atavique" entourant les gens du voyage, victimes "du même obscurantisme depuis le Moyen-Âge".
"Les communautés se barricadent, les maires, trop soumis à l'électorat, écoutent les peurs. On va retourner à une sorte de fascisme", dit l'artiste, marraine d'une campagne du Conseil de l'Europe contre les stéréotypes sur les Roms.
Pour SOS Racisme, les conclusions de la réunion de mercredi "procèdent d'un festival de clichés éculés entourant les populations visées".
Son président, Dominique Sopo, "appelle les pouvoirs publics à cesser de mettre en oeuvre des logiques de stigmatisation à l'endroit de populations dont on sait qu'elles sont fortement discriminées".
Le mot "stigmatisation" revient dans la plupart des réactions politiques à gauche.
"DISCOURS DÉMAGOGIQUE, AGRESSIF ET STIGMATISANT"
Auteur d'un "discours démagogique, agressif et stigmatisant", Brice Hortefeux "confirme la dérive sécuritaire et xénophobe du gouvernement", estime Pouria Amirshahi, secrétaire national aux droits de l'Homme du Parti socialiste.
Pour le parti de Martine Aubry, les incidents à l'origine de la réunion à l'Elysée, survenus à Saint-Aignan (Loir-et-Cher) à la mi-juillet, "auraient dû rester ce qu'ils sont, une affaire de vandalisme".
Le président PS de la région Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, regrette "une réunion pour stigmatiser les Roms et les gens du voyage", qui ont d'abord "besoin de mesures d'accompagnement social, d'écoute et de scolarisation des enfants".
"Trop, c'est trop", écrit pour sa part Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste, invitant partis de gauche, monde associatif et syndical et militants à dire "Stop aux exigences d'un gouvernement qui, en plus de jouer la provocation, ne fait que mettre le feu aux poudres !"
Pour les Verts, les mesures annoncées sont un nouvel exemple de la "politique du dérapage" de Nicolas Sarkozy.
Djamila Sonzogni, porte-parole du parti écologiste, évoque dans un communiqué "une nouvelle version de la démagogie sécuritaire d'un président en chute libre, affaibli par les scandales qui pourraient démontrer que le sommet de l'Etat est gangréné par la corruption".
Réponse de l'UMP: "Il y a ceux qui regardent la vérité en face et qui agissent" et "ceux qui, comme toujours, se voilent la face".
"Nos compatriotes qui subissent des pics de délinquance dans les zones où sont installés ces campements savent, eux, parfaitement de quoi on parle", écrit dans un communiqué le porte-parole du parti majoritaire, Frédéric Lefebvre.
Elizabeth Pineau, édité par Sophie Louet