Personnage fictif, casting douteux... Morandini jugé pour "harcèlement sexuel" et "travail dissimulé"

Six mois après sa condamnation à un an de prison avec sursis pour "corruption de mineurs", Jean-Marc Morandini va retrouver les bancs du palais de justice ce mardi. Mais cette fois, c'est pour "harcèlement sexuel" et "travail dissimulé" qu'il sera jugé par le tribunal correctionnel dans l'affaire dite de la web-série Les Faucons.
Pendant deux jours, l'animateur de CNews va devoir s'expliquer sur des castings douteux organisés en 2015 pour cette websérie, financée par sa société "Ne Zappez pas! Production".
C'est une enquête publiée par Les Inrocks en juillet 2016 qui a lancé la machine judiciaire: y témoignaient deux jeunes acteurs qui s'étaient vus réclamer des photos, des vidéos avant de passer des castings et de tourner dans la série, censée suivre une équipe de foot dans une ambiance de "vestiaires de sport entre garçons, sans vulgarité, mais également sans tabou".
Le personnage de "Catherine Leclerc"
Les deux comédiens accusaient Jean-Marc Morandini d'avoir profité des castings pour les pousser à s'exhiber nus, mais également d'avoir créé un personnage fictif, nommé "Catherine Leclerc".
Selon leurs témoignages, cette femme, qui se présentait comme directrice de casting des Faucons - en réalité Jean-Marc Morandini - avait insisté à plusieurs reprises pour qu'ils envoient des vidéos d’eux nus et des scènes de masturbation.
Une enquête avait été ouverte dans le mois suivant la publication de l'article, en août 2016. Au final, cinq acteurs avaient déposé plainte contre l'animateur pour "harcèlement sexuel".
L'enquête avait d'abord été classée sans suite en décembre 2016, avant d'être rouverte par un juge d'instruction en 2018 à la demande des plaignants. Mais en janvier dernier, au terme des investigations, le chef de harcèlement sexuel n'a été retenu qu'à l'encontre du cinquième, le magistrat estimant que les faits n'étaient pas caractérisés pour les quatre autres.
Des mails signés "Catherine Leclerc"
Àgé de 19 ans au moment des faits, le jeune homme en question assure avoir reçu, le 17 août 2015, deux mails de "Catherine Leclerc", signés "maman", lui demandant s’il se sentait de faire une fellation à Jean-Marc Morandini "qui n’est pas n’importe qui".
Lors d'une audition, en septembre 2021, l'animateur avait expliqué qu'il ne souhaitait pas faire apparaître son nom dans la série et avait "imaginé un personnage virtuel, Catherine Leclerc, en récupérant au hasard une photo sur internet d'une femme de 40 ans".
Dans son ordonnance de renvoi, la magistrate avait estimé que l'animateur avait "usé de toute forme de pression grave (à l’égard du plaignant) dans le but réel ou apparent d’obtenir à son profit un acte de nature sexuelle (…) et ce notamment par le biais de la création du personnage totalement fictif de Catherine Leclerc, figure maternelle et sécurisante inspirant confiance au jeune homme qui l’incitait à toujours repousser ses limites dans l’acte de nature sexuelle sous le prétexte allégué de travailler sa posture de comédien".
"M. Morandini démontrera qu’il n’a pas commis de harcèlement devant le tribunal", avait simplement répondu l'avocate du présentateur, Me Céline Lasek, après cette décision.
L'animateur sera également jugé pour des faits de "travail dissimulé", la société de production n’ayant pas déclaré les cinq acteurs auprès des organismes sociaux.
Appel de sa première condamnation
En décembre dernier, Jean-Marc Morandini a été condamné à un an de prison assorti d'une période de sursis probatoire de deux ans pour "corruption de mineurs" sur trois adolescents entre 2009 à 2016.
Deux d'entre eux, âgés de 15 ans au moment des faits, accusaient l'animateur de propositions sexuelles par SMS. Il avait décrit des scénarios sexuels à l'un et demandé des photos dénudées à l'autre. Concernant le troisième plaignant de 16 ans, Jean-Marc Morandini lui avait demandé, lors d'un casting à son domicile, de se dénuder et de mimer une scène de masturbation devant lui.
Le présentateur avait reconnu une "imprudence", indiquant ne pas savoir que les deux premiers comédiens étaient mineurs au moment des faits, et avait nié les faits reprochés par le troisième plaignant. Depuis, l'animateur a fait appel, et bénéficie donc toujours de la présomption d'innocence dans ce dossier.