BFMTV
Police-Justice

"On ne peut pas imaginer avoir ça à côté de chez soi": les parents d'une fillette accusant le chirurgien de viol témoignent sur BFMTV

placeholder video
Les parents d'une fillette accusant le chirurgien de Jonzac, suspecté d'avoir commis des abus sexuels sur de nombreux enfants pendant plusieurs décennies, se sont confiés ce jeudi. Indigné, le couple s'interroge sur notre antenne: "Comment a-t-il pu retravailler dans un hôpital?".

Alors que l'affaire du chirurgien de Jonzac soupçonné de pédophilie est en passe d'être jugée, certaines familles ont décidé de prendre la parole pour raconter leur calvaire. Parmi elles, les parents d'une fillette qui accuse le praticien de viol: la petite K., âgée de 6 ans au moment des faits. C'est grâce à elle que toute l'affaire sera révélée, et c'est à la suite de son témoignage que d'autres dépôts de plainte à l'encontre du chirurgien interviendront. Ses parents ont accepté de témoigner ce jeudi sur notre antenne. 

Au printemps 2017, l'enfant avait confié que leur voisin s'était exhibé devant elle pendant qu'elle jouait dans le jardin familial, avant d'affirmer que l'homme l'avait violée, ce qu'il nie. La famille de l'enfant a porté plainte contre le médecin, qui sera jugé début 2020 sur le premier volet judiciaire de l'affaire, qui implique 4 jeunes victimes et porte sur des soupçons de viol et agressions sexuelles. 

"C'est grâce à elle tout ça"

Le praticien à la retraite, qui sera également jugé pour viols et agressions sexuelles sur trois autres victimes présumées, cette fois dans le cadre de son activité professionnelle, est soupçonné d'avoir sexuellement agressé et violé de très nombreux enfants en Charente-Maritime entre 1989 et 2017. Dans des carnets, il évoque 200 victimes potentielles, au moins trois plaintes ont été déposées à ce stade, mais ce chiffre pourrait rapidement augmenter.

Deux ans après avoir appris que leur fille avait été abusée, les parents de K. sont encore extrêmement affectés par cette affaire sordide.

"On rentrait d'une promenade et on est allés fumer une cigarette dans le jardin", se souvient le père de famille. Mais alors qu'il discute tranquillement avec son voisin à travers le grillage qui les sépare, sa jeune fille de 6 ans l'exhorte à rentrer chez eux.
"Nous discutions de choses et d'autres, pas plus", raconte le père de l'enfant. Mais "ma fille s'est pressée de façon très bizarre. Elle me demandait alors, de façon pressante: 'papa, je veux voir les photos qu'on a prises pendant la promenade'. Je lui disais: 'oui, je discute, on va y allez, ne t'inquiète pas'. Mais elle était vraiment pressante, elle continuait, mais d'un air bizarre".

C'est en rentrant chez eux, après cette discussion de voisinage, que la fillette trouve le courage de raconter à son père ce qui la tracasse. Son père se souvient: "J'arrive dans le salon avec mon téléphone pour lui faire voir les photos, et là elle me dit: 'si je te dis quelque chose, tu ne me fâcheras pas?'.

"Alors je lui réponds que non, j'ai toujours appris à ma fille qu'il valait mieux dire les choses tout de suite, plutôt que je l'apprenne après", raconte la voix tremblante ce père, encore bouleversé par les propos de sa fille. "Donc elle me dit 'le monsieur là, il m'a fait voir son zizi'. Donc là j'ai compris qu'il s'était passé quelque chose".

"Comment a-t-il pu retravailler dans un hôpital?"

À la suite de ces révélations, la mère de K. décide de se rendre dans la chambre de la petite fille afin d'en parler avec elle, pour comprendre ce qui s'était vraiment passé avec ce voisin. "J'en ai parlé pendant plus d'une heure avec elle pour savoir réellement ce qui s'était passé, savoir si ça avait été plus loin ou pas", témoigne sa mère. "Je lui ai donné une poupée pour qu'elle fasse voir les gestes qu'il avait eus, et qu'elle me précise vraiment comment c'était fait".

"On ne peut pas imaginer avoir ça à côté de chez soi", déplore sur notre antenne le père de la petite fille, désemparé. "Avec tout ce qu'on sait aujourd'hui, je me dis que ma fille a quand même réussi à arrêter un des plus grands pédophiles de France. C'est grâce à elle tout ça. Je pense qu'on peut la considérer comme un héros aujourd'hui".

Les parents de la fillette expliquent avoir dû déménager, en raison des difficultés rencontrées par la suite par leur fille. "Elle a du mal (...) Elle est suivie par une psychologue", explique son père. "À l'école, elle était tellement perturbée qu'elle a pris un retard malheureusement." "On a tout fait pour la sortir de là mais oui, il y a eu beaucoup de mal. Voilà, le mal est fait", soupire-t-il.

Indigné, le couple estime que la justice "n'a pas fait son travail à ce moment-là", et s'interroge: "Comment a-t-il pu retravailler dans un hôpital? Comment une personne comme ça, qui veut sauver des vies, on ne demande pas un casier judiciaire à l'entrée?". "Ça, c'est ignoble de leur part, je ne sais même pas comment l'expliquer". Le chirurgien, désormais retraité, avait déjà été condamné en 2005 à Vannes pour détention d'images pédopornographiques. 

Amélie Rosique avec Jeanne Bulant