Matricule des policiers : « Une mesurette qui ne changera rien »

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Oui au matricule, non au récépissé. En annonçant mercredi le retour du matricule sur les uniformes policiers pour lutter contre les contrôles au faciès, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a de fait enterré une promesse de campagne de François Hollande : la remise d’un récépissé par les policiers après un contrôle d’identité. Manuel Valls a répété mercredi qu'un récépissé n'était « pas efficace »: « Je ne veux pas que les policiers et les gendarmes aient une tracasserie administrative supplémentaire ». « On se moque de nous », ont réagi les associations à cette annonce.
« Est-ce que les policiers laisseront noter leur matricule ? »
Pour Lanna Hollo, de l'Open Society Justice Initiative, « ce que nous propose le ministre de l'Intérieur est complètement insatisfaisant et déplorable ». Avec le récépissé, « on aurait pu avoir des informations sur les motifs des contrôles, leurs résultats, leur cadre légal », dit-elle.
Pour Franco, porte-parole du collectif "Stop au contrôle au faciès" qui réclamait la mise en place d'un récépissé, le retour du matricule, « c’est une mesurette. Cela vise à donner l'impression que quelque chose se fait, mais on sait très bien que ça ne changera rien. Vous prenez une personne lambda, elle a souvent du mal à retenir le numéro de code de sa carte bancaire, donc vous imaginez dans un contrôle d'identité qui se passe mal. Est-ce que vous aurez le temps de retenir un numéro avec une succession de chiffres et peut-être des lettres ? Est-ce que les policiers vous laisseront le noter avec un stylo ? On sera toujours dans l'illusion de justice et pas dans la véritable justice », dénonce-t-il sur RMC.
« Des files pour les noirs »
L’ancien joueur de l’équipe de France de football, Lilian Thuram, est lui aussi un farouche défenseur du récépissé. Au collectif "Stop au contrôle au faciès", il avait raconté cette anecdote : « Alors que je prenais le TGV Gare de Lyon, un policier m'arrête. Je lui dis "très bien, mais pourquoi vous n’arrêtez que les personnes noires" ? Je lui dis, "vous savez la prochaine fois faites une file avec un panneau où serait écrit : ''pour les noirs''. Comme ça, nous on saura, on passera là avec nos papiers d'identité, ce sera plus simple" ».
« Ça ne gênait en rien notre activité »
Du côté de la police, on sourit presque du retour du matricule, disparu en 1985 avec l’arrivée de nouvelles tenues. Mais on se dit prêt à y revenir, comme l’explique Yannick Danio, délégué national du syndicat Unité SGP Police et ancien matricule 12954 : « Ça ne gênait en rien notre activité. Effectivement, la personne qui était contrôlé et qui n'était pas contente disait "je vais relever votre matricule, vous aurez de mes nouvelles". Alors pourquoi ne pas revenir, ou expérimenter dans un premier temps, cette démarche qui est tout à fait logique ? ».