BFMTV
Police-Justice

"Mariage chinois": l'ombre de Jean Germain va peser sur le procès 

placeholder video
Interrompu peu avant son ouverture à la suite du suicide de Jean Germain, le procès de l'affaire dite des "mariages chinois" s'ouvre ce mardi. L'ombre du défunt, l'ancien maire PS de Tours, va peser de tout son poids sur les trois jours de débats.

Le procès de l'affaire des "mariages chinois", reporté avant son ouverture le 7 avril dernier par le suicide du sénateur socialiste Jean Germain, s'ouvre ce mardi devant le tribunal correctionnel de Tours, devant lequel l'ancien maire de la ville n'avait pas supporté d'être convoqué, et dont l'ombre pèsera sur les trois jours de débats.

Quelques instants avant l'ouverture de l'audience, Jean Germain s'était tué d'une décharge de fusil de chasse, frappant de stupeur les autres prévenus de l'affaire mais aussi les magistrats, avocats et journalistes qui l'attendaient pour l'ouverture de l'audience. Son geste avait semé la consternation parmi les Tourangeaux et dans la classe politique française, qui lui a rendu unanimement hommage.

Les "Noces romantiques en Touraine"

L'affaire des "mariages chinois" tire son origine dans l'organisation entre 2007 et 2011 de "Noces romantiques en Touraine". Celles-ci comprenaient des visites de châteaux de la Loire, ainsi que de la ville de Tours dont le maire, ceint de son écharpe tricolore, posait pour la photo au côté de couples chinois qui venaient de renouveler symboliquement leurs voeux devant lui.

L'organisation de ces "mariages" était pilotée par une société dont Lise Han, embauchée en 2008 au cabinet du maire Jean Germain, puis par la société d'économie mixte (SEM) en charge du tourisme tourangeau, continuait de tirer les ficelles en sous-main après avoir démissionné officiellement de ses fonctions dirigeantes. Lise Han, originaire de Taïwan, était donc la gérante de fait de cette société, selon les magistrats instructeurs, qui l'ont mise en examen le 25 janvier 2013 pour "escroquerie", "prise illégale d'intérêt" et "recel de fonds publics".

"Leur conscience les poursuivra"

Quelques mois plus tard, le 30 octobre, Jean Germain était à son tour mis en examen des chefs de "complicité de prise illégale d'intérêts et de détournement de fonds publics".

Il devait échouer ensuite aux dernières élections municipales, alors qu'il briguait un quatrième mandat. Dans la lettre d'adieux écrite avant de se tuer, Jean Germain a jeté l'anathème sur "les actions de Madame Han et les mensonges peureux de M. (Jean-François) Lemarchand", le directeur de la SEM qui a recruté Lise Han après qu'elle eut été remerciée par le maire de Tours.

"Leur conscience les poursuivra", a-t-il prédit.

Lise Han et Jean-François Lemarchand comparaîtront à partir de mardi devant le tribunal correctionnel de Tours avec Vien Loc Huynh, le gérant officiel de la société de Lise Han, et François Lagière, l'ancien directeur de Jean Germain.

Un livre vient semer encore un peu plus le trouble

L'ombre de Jean Germain pèsera d'autant plus sur le procès qu'un livre, Enquête sur un suicide politique (Editions Cherche-Midi), est sorti en librairie au début du mois d'octobre. Ecrit par un journaliste tourangeau indépendant, Arnaud Roy, et un proche de l'ancien maire, Alain Dayan, l'ouvrage dresse une biographie flatteuse de l'ancien sénateur socialiste en estimant que l'affaire a été révélée par des adversaires politiques désireux de lui nuire.

Les auteurs critiquent également les magistrats instructeurs et vilipendent le rôle de Lise Han et de Jean-François Lemarchand. L'avocat Gérard Chautemps promet: "Qu'on ne compte pas sur (ma cliente) Lise Han pour charger Jean Germain de maux dont il ne peut pas répondre".

"Après le suicide de Jean Germain, il y aura nécessairement des questions auxquelles il ne pourra pas y avoir de réponse, mais cela ne change rien: les marchés (pour l'organisation des mariages chinois) ont été passés de manière régulière et les prestations ont été fournies", a-t-il dit.

Pour l'ancien avocat de Jean Germain, Me Dominique Tricaud, "ce procès va se tenir comme il le devait dès le départ: en l'absence de Jean Germain".

"Cela permettra de constater qu'il peut parfaitement se dérouler sans lui, et apporter ainsi la preuve qu'il n'avait rien à voir avec cette affaire", a-t-il assuré.

Jé. M. avec AFP