Le procès du Mediator renvoyé pour une question de procédure

Jacques Servier, fondateur des laboratoires Servier. - -
C'est le scénario que les victimes du Médiator redoutaient. Lundi, le tribunal correctionnel de Nanterre s'est prononcé en faveur du report du premier procès pénal du Mediator, pour une question de procédure. Le tribunal a donc donné raison aux laboratoires Servier et à leur fondateur, poursuivis pour tromperie aggravée. A l'ouverture du procès la semaine dernière, leurs avocats avaient expliqué que le groupe pharmaceutique et son patron, âgé de 90 ans, ne pouvaient être jugés pour des faits pour lesquels ils sont également mis en examen par des juges d'instruction de Paris. La présidente de la 15e chambre du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez, a jugé "sérieuse" la question de droit soulevée par la défense des Laboratoires Servier et de Jacques Servier.
Le tribunal a retenu une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par les prévenus. Elle porte sur la coexistence entre cette procédure et une information judiciaire en cours à Paris sur les mêmes faits, ce qui, selon les prévenus, porte atteinte à leurs droits. Cette QPC sera soumise à la Cour de cassation qui aura trois mois pour statuer.
Prescrit à des millions de personnes de 1976 à 2009, le Mediator, présenté comme anti-diabétique mais prescrit comme coupe-faim, aurait fait, selon des rapports officiels, de 500 à 2.000 morts.
Ce premier procès résultait d'une citation directe délivrée par environ 600 plaignants et une association de consommateurs contre Jacques Servier et quatre autres dirigeants, la société Servier et sa filiale commerciale Biopharma.
« Les victimes auront droit à un procès dans un délais raisonnable »
Me Hervé Temime est avocat de Jacques Servier dans le procès du Médiator. Il trouve juste cette décision de report du procès : « le tribunal a transmis une QPC considérant que cette double poursuite posait un problème relatif aux droits de notre défense, cela me paraît être une sage décision. Ce procès n’avait pas lieu d’être dans ces conditions. Cette décision du tribunal ne met pas un terme à cette procédure et les victimes et les consommateurs auront droit à un procès dans un délais raisonnable mais pas un procès escamoté ou tronqué pour les victimes ».
« C’est Jacques Servier qui a contrôlé cette tromperie »
Irène Frachon est pneumologue. C’est elle qui est à l’origine de la médiatisation du scandale du Médiator. Cette décision du tribunal ne la rassure pas : « mon inquiétude c’est de savoir dans combien de temps cette instruction aboutira à un procès. Les victimes ont malheureusement un temps compté et que Jacques Servier est très âgé. Tout le monde a bien compris que malgré son grand âge c’est lui qui a contrôlé cette tromperie depuis plus de quarante ans. Ca porterait un coup très dur à la procédure. Vis-à-vis des victimes ce serait quelque chose de très difficile ».