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"L'institution fabriquait des pervers": le porte-parole des victimes de Bétharram s'exprime sur BFMTV

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Alain Esquerre, porte-parole des victimes de Bétharram, était l'invité de BFMTV ce jeudi 20 mars. Il est revenu sur le systhème Bétharram et appelle à une réforme de l'Église après ces scandales.

Alain Esquerre porte inlassablement la parole des victimes de Bétharram. Principal récepteur des témoignages d'anciens élèves de cet établissement catholique des Pyrénées-Atlantiques, le porte-parole des victimes de Bétharram tire une première, aussi grande qu'effroyable, conclusion sur BFMTV: "l'institution fabriquait des pervers".

"Je pense qu'il y a un problème avec les prêtres et la sécurité et il faudra s'interroger sur la question du célibat une bonne fois pour toute", martèle le porte-parole des victimes de Bétharram, tandis que les auditions dans le cadre de la commission d’enquête parlementaire démarrent ce jeudi matin à l'Assemblée nationale.

"Elle nous le doit à tous"

Alain Esquerre émet aussi un souhait: que l'Église se réforme après ces scandales. "Je pense que s'ils coûtent énormément cher à l'Église, elle va peut-être se réformer et il serait temps, car en tant que chrétien, je trouve que c'est ce qu'elle nous doit à tous."

Dans sa vie, Alain Esquerre dit avoir connu des enseignants avant et après leur passage à Bétharram. "Je pense notamment au diacre Ange Mur, que j’ai eu comme enseignant, à qui je ne peux rien reprocher, et qui va se mettre à frapper des enfants quand il va être à Bétharram", affirme le porte-parole des victimes.

"Je pense qu'il y a un tel ADN de violences dans cet établissement qu'on ne peut pas faire autrement que de devenir violent quand on a des responsabilités éducatives à Bétharram", poursuit-il. "Et tout ça avec la complicité de toute la communauté."

Prendre connaissance du contenu des plaintes déposées par les anciens élèves, c'est comprendre les rouages du "système Bétharram". "Je crois qu'il y avait énormément de violences physiques. De toute façon, on ne peut pas avoir été élève là-bas et dire: 'moi je n'ai vu aucune violence'. C’est totalement impossible", affirme Alain Esquerre. "C'est totalement impossible car les tabassages en études, on y assistait tous."

La "pression du silence"

"Le règne du silence" s'applique entre les murs de cet établissement fondé en 1837, longtemps prisé des familles aisées béarnaises. "Vous subissez cette pression du silence d'une façon continue, de 8h à 19h30", détaille le porte-parole des victimes de Bétharram, alors externe à l'époque. "Mais imaginez la vie de ces internes, elle était diaboliquement sidérante."

Les élèves "n'avaient pas le droit de s'exprimer au dortoir". Aucune veillée n'était proposée à Bétharram où "le jeu était proscrit", poursuit Alain Esquerre.

La récréation offrait aux élèves une pause, une bulle dans laquelle ils pouvaient s'exprimer, se parler. Mais en réalité, ce moment était celui des règlements de compte. Alain Esquerre se souvient d'une "violence extrême entre les enfants" car "vous êtes conditionnés dans la violence, vous n’avez pas d’autre solution".

À la date du 31 janvier 2025, 112 lettres ont été enregistrées en procédure pour dénoncer des faits de viols aggravés, d’agressions sexuelles aggravées et de violences aggravées commis entre 1955 et 2004 au sein de l’institution religieuse.

Ce jeudi 20 mars, Alain Esquerre annonce à la commission d'enquête parlementaire de l'Assemblée nationale avoir "180 plaintes, mais au-delà des plaintes, j'ai énormément de témoignages". Son collectif, fondé le 10 octobre 2023, compte à ce jour "plus de 2.000 membres".

Charlotte Lesage