Jeune tué à Crépol: Frédéric Ploquin pointe une "violence qui déborde des territoires habituels"

"Un coup de couteau planté dans la France rurale". Ce sont les termes employés par le journaliste et spécialiste du grand banditisme Frédéric Ploquin sur BFMTV-RMC ce mercredi, pour décrire le drame de Crépol, intervenu trois jours plus tôt.
Dans ce village de quelque 500 habitants situé dans la Drôme, une dizaine de personnes munie d'armes a fait irruption lors d'un bal, où l'entrée leur avait été refusée, entraînant la mort d'un jeune adolescent de 16 ans, Thomas, et une vingtaine de blessés.
Frédéric Ploquin caractérise la particularité de ces agissements, soulignant que cette "violence déborde des territoires où on a l'habitude de la voir".
"Des coups de couteaux dans des bals, des fêtes qui dégénèrent il y en assez régulièrement, mais quand ça se passe comme ça se passe assez souvent dans des banlieues populaires, où on a l’habitude de voir des règlements de compte, on n'en parle pas trop. Ça ne fait pas les une des médias", explique-t-il.
"On n'hésite pas à aller à dix contre un"
Frédéric Ploquin décrit, par ailleurs, une évolution de la violence touchant les jeunes, en référence à l'âge des personnes interpellées après le meurtre à Crépol. "Quand il y avait des soucis entre jeunes comme ça, ça se réglait le plus souvent par des tête-à -tête. On se retrouvait au milieu d’un terrain de football et c’est le plus fort qui gagnait. Aujourd’hui, ça ne fonctionne plus comme ça", analyse le co-réalisateur du documentaire La drogue est dans le pré.
Avant de poursuivre: "Maintenant, on n'hésite pas à aller à dix contre un, à sortir des armes contre quelqu’un qui n’en a pas. Et en l’occurrence, c’est pour ça là que cette affaire fait autant de bruit." Et d'insister:
“La bagarre entre hommes qui veulent être les plus beaux, les plus forts, les plus costauds (...) ces rites là ont toujours existé depuis qu’il y a des bals populaires en France. (...) [Avant], on en ressortait avec des blessures, mais pas dans un cercueil. En réalité, c’est ça la grande différence.”
"Comme si la vraie vie rejoignait la fiction"
Si plusieurs responsables de la droite et son l'extrême, ainsi que Gérald Darmanin, parlent d'"ensauvagement" de la société, Frédéric Ploquin ne reprend pas ce mot et évoque une "désinhibition de la violence". "C'est un peu comme si la vraie vie rejoignait la fiction, les séries télés", dit-il.
Le journaliste d'investigation met également en exergue "l'apparition des armes de guerre". "C'est extrêmement important, parce qu'on est passé des armes de poing aux armes de guerre", souligne-t-il. Or, celles-ci induisent "un mental, un comportement particulier pour celui qui l'emploi" et entraînent des "victimes en dehors de ceux qu'on a l'intention de tuer". Et de citer à ce titre, la mort de la jeune Socayna à Marseille en septembre ou de Fayed à Nîmes un mois plus tôt.
"Thomas est la troisième victime de ce type de violence qui déborde, qui n'est plus contrôlée", fait remarquer Frédéric Ploquin, même si l'adolescent a été tué par une arme à poing et non une balle perdue.
Neuf personnes ont été interpellées ce mardi aux environs de Toulouse et placées en garde à vue. Parmi les interpellés, se trouve la personne suspectée du meurtre de Thomas, selon les informations données par une source proche de l'enquête à BFMTV. Une marche blanche "apolitique" est organisée ce mercredi à 13h30 à Romans-sur-Isère, dans la Drôme, pour lui rendre hommage.