INFO BFMTV. L'avocate qui a refusé de serrer la main de Gérald Darmanin porte plainte pour cyberharcèlement et injures aggravées

La séquence, captée devant le tribunal judiciaire de Nanterre, a fait le tour des réseaux sociaux. Mais elle a aussi suscité une vague de haine contre celle qui a été présentée comme "l'avocate qui a refusé de serrer la main de Gérald Darmanin". Maître Camilla Quendolo, avocate au barreau de Nanterre, a décidé de déposer plainte.
Ce mardi 29 juillet à la mi-journée, à l'issue de la visite de Gérald Darmanin au tribunal judiciaire de Nanterre, deux avocats patientent à proximité des journalistes. Me Camilla Quendolo et son confrère Me Aziz Smira souhaitent interpeller le ministre sur sa volonté de réformer le système judiciaire.
"Un prétexte"
Alors que le ministre de la Justice s'avance avec la main tendue, l'avocate refuse de lui serrer la main. "Je rappelle qu’une poignée de main n’est pas un préalable nécessaire à une discussion contradictoire et démocratique et que chacun dispose de la liberté de refuser un contact physique", explique-t-elle, auprès de BFMTV.
"Je constate par ailleurs que Gérald Darmanin n’a jamais eu l’intention de répondre à nos questions, et que cette poignée de main n’a été qu’un prétexte, dans la mesure où mon confrère Aziz Smira – qui a choisi de lui serrer la main – n’a obtenu aucune réponse. Mon refus est également et surtout un geste de rupture et de protestation (non-violent) à l’égard de la politique pénale menée par Gérald Darmanin et à la réforme judiciaire qu’il était venu présenter", ajoute-t-elle.
Gérald Darmanin entend "révolutionner la justice pénale" en revenant, notamment, sur le principe d'aménagement obligatoire de certaines peines d'emprisonnement, ou en réservant le sursis uniquement aux primo-délinquants. Des mesures de "bon sens", selon lui.
Chez les avocats, ces mesures sont loin de faire l'objet d'un consensus. "Cette réforme propose la mise en place de mesures redondantes, procède d’une méconnaissance nette du droit des peines (notamment sur la question de l’aménagement obligatoire) et crée un effet loupe sur certains sujets spécifiques – à des fins populistes et électorales en niant la réalité quotidienne de la justice pénale", indique Camilla Quendolo à BFMTV.
"Elle ne permettra donc de réduire ni la récidive ni la surpopulation carcérale, et les aggravera au contraire, en limitant notamment la faculté pour les juges d’individualiser les peines", ajoute-t-elle.
Des messages haineux
Depuis la séquence de la poignée de main refusée à Gérald Darmanin, l'avocate subit un cyberharcèlement très important sur les réseaux sociaux, mais pas uniquement. Dans sa plainte, que BFMTV a pu consulter, Me Camilla Quendolo indique avoir dû retirer ses "coordonnées professionnelles" sur Internet car elle a aussi été victime de harcèlement téléphonique.
Les messages haineux, dont nous avons pu prendre connaissance, sont tantôt menaçants, racistes, insultants, ou sexistes.
"Il est particulièrement ironique que les auteurs de ces actes – lesquels prétendent appeler à une plus grande sévérité de la justice – ne prennent pas conscience que leur comportement caractérise des infractions pénales et qu’ils sont donc eux-mêmes, de fait, des délinquants", souligne l'avocate.
"Compte tenu de la gravité des propos et comportements constatés, une plainte pour injures aggravées publiques et non publiques, harcèlement moral et tentative d’introduction frauduleuse dans un système informatique a été déposée."
Victime d'une tentative de piratage
L'avocate de 32 ans, qui a notamment défendu l'un des accusés dans le procès dit Samuel Paty, explique aussi avoir été victime d'une tentative de piratage.
"Quand les auteurs identifiés de ces infractions comparaîtront devant le tribunal correctionnel, je ne doute pas du fait qu’ils seront les premiers satisfaits de pouvoir solliciter l’assistance d’un avocat et le bénéfice d’une alternative à la détention." explique t-elle.
Ce dernier fait peut être puni de 3 ans de prison et 100.000 euros d'amende.