GRDF, GDF Suez et Veolia devant la justice pour une explosion de gaz

C'est à hauteur de cet immeuble, au 119 cours Lafayette à Lyon, que s'était produite l'explosion. - -
L'explosion de gaz, il y a près de 6 ans, avait tué un pompier et blessé plusieurs dizaines de personnes. A Lyon, où s'est produit le drame, le procès des responsabilités s'est ouvert pour trois semaines devant le tribunal correctionnel. Le procès, qui s'annonce très technique, est prévu jusqu'au 13 février.
Dans le box, fait inhabituel, pas de prévenu mais cinq entreprises, qui comparaissent notamment pour "homicide et blessures involontaires": GRDF, GDF Suez, Veolia et deux de leurs sous-traitants. Les cinq sociétés sont également poursuivies pour "dégradation involontaires par explosion ou incendie dues à un manquement à une obligation de sécurité".
Face à elle, sur les bancs des parties civiles, environ 150 personnes physiques et morales. Dans le palais de justice, de nombreux pompiers sont notamment venus pour leur collègue victime.
Une canalisation de gaz arrachée
A l'origine, une mauvaise manipulation de cinq employés de l'entreprise Roche, sous-traitante de Veolia. Ce 28 février 2008, ils effectuent des travaux de réfection des conduites d'eau sous la chaussée, à hauteur des numéros 117-119 du cours Lafayette, dans le 6e arrondissement de Lyon.
Les ouvriers n'ont pas réalisé de sondage ou de tranchée préalable. Une omission qui va se révéler fatale: mal renseignés sur le plan des canalisations de gaz, ils en arrachent involontairement une vers 11h30.
Le gaz s'échappe sous l'immeuble. A 12h15, c'est l'explosion. Un souffle d'une rare violence, qui tue Stéphane Abbès, un pompier en reconnaissance de l'immeuble "écrasé par l'effondrement d'un plancher", selon l'ordonnance de renvoi citée par Lyon Capitale. Les immeubles sont dévastés, les vitres de fenêtres voisines soufflées, la rue jonchée de débris. En tout, une soixantaine de personnes, pompiers, employés de GRDF, riverains, passants, sont blessés.
"Une faute impardonnable"
Selon Lyon Capitale, citant l'ordonnance de renvoi, les techniciens ont évoqué "une torchère de plusieurs mètres de haut" qui "fusait du trappon de gaz". Des images ont été montrées au procès. Les flammes ne sont éteintes que vers 14 heures, après la fermeture de plusieurs vannes par GDF. Une procédure qui n'est lancée qu'après 13 heures.
Très ému à l'ouverture du procès, le père du pompier tué a déploré une "faute impardonnable", "presque un crime". Dans un reportage sur la chaîne locale TLM, Jean-Claude Abbès déplore le retard de GDF, "le seul à avoir le pouvoir de fermer et d'ouvrir les vannes de gaz", qui s'est exécuté "90 minutes après l'explosion".
Négligences et techniques inadaptées
L'enquête a fait ressortir des causes multiples. A la fois des négligences de la part des sociétés intervenant sur le chantier, et dans la gestion de la fuite de gaz.
• Gaz réseau distribution de France, chargé de la maintenance et de l'intervention, s'est vu reprocher de n'avoir pas mis en place une procédure efficace, connue de ses employés, en cas de fuite dans un ouvrage enterré.
• GDF Suez s'est vu imputer une "néglicence" dans sa mission de contrôle du chantier lorsque les canalisations de gaz ont été installées, en ne donnant pas l'ordre de les protéger davantage.
• Veolia est accusé de n'avoir pas respecté son obligation de demande de renseignement, et de ne pas avoir disposé de plans suffisamment à jour avant de procéder aux travaux.
• La société Roche est poursuivie pour la technique inadaptée utilisée lors du changement de canalisation d'eau, sans avoir fait de sondages préalables pour s'assurer de la véracité des plans.
• La société Gauthey, qui avait remplacé la canalisation de gaz en 2003, est enfin poursuivie pour ne pas l'avoir suffisamment protégée.
Les cinq sociétés encourent 225.000 euros d'amendes et diverses peines complémentaires... Jusqu'à l'interdiction d'exercer.