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Police-Justice

Foie gras: le gavage en procès après l'effroi suscité par une vidéo de L214

Une vidéo mise en ligne par l'association de défense des animaux L214 dénonce les conditions de gavage déplorables des oies.

Une vidéo mise en ligne par l'association de défense des animaux L214 dénonce les conditions de gavage déplorables des oies. - Capture YouTube - L214

Est-ce le procès des conditions du gavage des oies ou celui du gavage lui-même? Un producteur de Vendée comparaît ce jeudi devant le tribunal correctionnel de La Roche-sur-Yon. Il doit répondre de "sévices graves et actes de cruauté", et est poursuivi par l'association de défense des animaux L214, qui milite contre cette pratique d'engraissement forcé.

En novembre 2013, l'association L214 avait publié une vidéo dénonçant les conditions de gavage des canards dans des fermes sous contrat avec la société Ernest Soulard, basée dans la commune de L'Oie, en Vendée, qui s'est fait un nom en fournissant de grandes tables parisiennes. Une entreprise aujourd'hui citée pour "sévices graves et actes de cruauté" et qui comparaît ce jeudi devant le tribunal correctionnel de La Roche-sur-Yon.

Après la diffusion des images qui ont déclenché ce procès, le chef multi-étoilé Joël Robuchon avait décidé de suspendre ses approvisionnements auprès de ce fournisseur. La vidéo montrait des canards cantonnés dans des cages individuelles, ne pouvant pratiquement pas bouger.

L214, qui avait porté plainte début 2014 pour "sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux" et pour "mauvais traitements envers un animal", poursuit la société sur citation directe, une procédure sans enquête de police, où le tribunal juge sur les pièces produites par les parties.

Le gavage est-il assimilable à de la maltraitance?

Pour l'association, ce "premier procès du gavage en France" va permettre "de discuter du fondement, de la légalité ou pas de cette pratique" et des "conséquences qu'elle peut avoir sur les animaux", explique la porte-parole de L214, Brigitte Gothière.

"La société Ernest Soulard est visée, car nous avions des éléments suffisants pour engager la procédure. Si la société est condamnée, cela aura évidemment une incidence sur la pratique du gavage, interdite par de nombreux pays", estime l'avocate de l'association, Hélène Thouy, précisant que le délit "d'actes de cruauté" est passible de "30.000 euros d'amende et deux ans d'emprisonnement".

En face, l'approche de ce face-à-face judiciaire n'est pas du tout la même. "Ce n'est pas le procès du gavage. La question est: 'Est-ce qu'il y a eu maltraitance ou pas?' Nous allons démontrer pas à pas, minute par minute, que ce n'est pas le cas. Nous avons des éléments factuels pour démontrer que la vidéo est un montage (...) et que tout n'a pas été tourné chez nous", affirme le directeur général d'Ernest Soulard, Roland Tonarelli, citant "des cages très sales sur un plan global", puis "d'un coup une cage très propre sur un plan serré".

Les deux parties, plainte contre plainte

La société vendéenne avait porté plainte peu après la diffusion de la vidéo pour "violation de domicile" et pour dégradations. L'association L214 et deux de ses membres doivent comparaître également jeudi pour ces faits. "Nous ne sommes pas des barbares (...). La vidéo a fait du mal aux producteurs et créé un climat de suspicion", déplore Roland Tonarelli, "convaincu" que l'entreprise "sortira blanchie de cette affaire".

L'Union européenne, qui a interdit les cages individuelles en 2011, a donné aux producteurs jusqu'au 31 décembre 2015 pour s'équiper de cages collectives pour le gavage. La fondation de protection des animaux de Brigitte Bardot est également récemment montée au créneau sur la question du gavage.

David Namias avec AFP