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Police-Justice

En réponse à la réforme de la justice, les avocats, en grève, décrètent une "justice morte"

Au mois de février, des avocats marseillais se sont rassemblés pour réclamer "une justice de qualité".

Au mois de février, des avocats marseillais se sont rassemblés pour réclamer "une justice de qualité". - Anne-Christine Poujoulat - AFP

Une justice sans avocat et sans juge, voilà ce que dénoncent les avocats de France qui entament aujourd'hui une première journée de grève. Ils protestent contre les propositions du gouvernement qui, selon eux, bafouent, les droits de la défense et du justiciable.

Un à un les barreaux ont voté la même motion: ce mercredi 21 mars sera un jour de "justice morte". La quasi-totalité des barreaux de France, regroupant les avocats dans chaque tribunal de grande instance, ont décidé de se mettre en grève pour protester contre les grands axes de réforme de la justice voulus par le gouvernement et défendus au début du mois de mars par la ministre Nicole Belloubet. Au total, 103 barreaux se sont lancé dans une grève ciblée, sept autres, comme à Melun, dans le Val-d'Oise ou à Chartres, ont voté une grève illimitée.

Pour le Conseil national des barreaux, avec ce nouveau projet de loi l'avocat est placé "en angle mort" comme l'explique à France Info sa présidente Christiane Féral-Schulh. "Il donne le sentiment d’une justice sans avocats, mais également sans juges - puisqu’on est dans une approche de déjudiciarisation - et sans les citoyens, puisque le tribunal criminel qui doit être expérimenté écarte les jurés au profit de magistrats professionnels", poursuit-elle. Dans le viseur des avocats: la création de tribunaux criminels pour suppléer les cours d'assises pour les crimes passibles d'une peine allant jusqu'à 20 ans de prison.

Dénonçant, il y a quelques jours, auprès de BFMTV.com une "solution patch", Christiane Féral-Schulh s'en prend également à la méthode: "Nous avons discuté avec la chancellerie sur 153 propositions. Nous en avons accepté beaucoup et nous avons découvert ces idées en même temps que la presse."

Les "droits de la défense" bafoués

Les avocats protestent également contre d'autres mesures. "En matière pénale, sous influence exclusive du ministère de l’Intérieur, la Justice serait principalement confiée au procureur et à la police au détriment des libertés individuelles et de la défense des droits des victimes", dénonce-t-on au barreau de Paris visant notamment la facilitation, pour le parquet, des interceptions de communications électroniques et de géolocalisation. S'attaquant également à une privatisation de la justice avec la mise en place de plateforme en ligne de résolution de litiges ou une déjudiciarisation au profit des notaires ou à la crainte d'une suppression de juridiction, les robes noires veulent protéger le "justiciable" et les "droits de la défense".

Ainsi, cette première journée de "Justice morte" va se traduire par la suppression de l'intervention des avocats à toutes les audiences que ce soit en matière civile, pénale, administrative, commerciale ou prud'homale, par la fermeture des cabinets, par des rassemblements ou par l'interruption de la désignation d'avocats pour les permanences ou pour les commissions d'office. Le Syndicat de la magistrature s'est associé au mouvement et certains juges dans des tribunaux ont d'ores et déjà décidé de renvoyer des audiences pour certaines affaires non-urgentes.

Justine Chevalier