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Police-Justice

Disparus de l'Isère: 20 ans après, un homme comparaît pour le meurtre de Saïda, 10 ans

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Entre 1983 et 1996, une série de disparitions d'enfants dans le département de l'Isère laissait les enquêteurs sans réponses. Des années plus tard, une expertise ADN permettait d'identifier un suspect de deux meurtres. Son procès s'ouvre mercredi.

Cela fait 20 ans que la famille de la petite Saïda Berch attend ce procès. Le 26 novembre 1996 au matin, le corps de la fillette de 10 ans était retrouvé dans un canal à Voreppe (Isère), deux jours après sa disparition. L'autopsie concluait à une mort par strangulation provoquée à l'aide du pull de la victime, sans détecter de sévices sexuels.

Malgré l'audition de près de 500 personnes et de nombreux tests ADN, les enquêteurs furent incapables, à l'époque, d'identifier un suspect, et l'instruction aboutit à un non-lieu le 28 septembre 1999. Cette affaire est la dernière en date d'une série de disparitions, de meurtres ou d'agressions d'enfants survenus dans les années 80 et 90, appelés "disparus de l'Isère".

L'ADN identifié 20 ans après

Sept ans plus tard, en avril 2006, le dossier est rouvert à la faveur d'un rapprochement avec une autre affaire, celle du meurtre de Sarah Syad, six ans, le 16 avril 1991, dans la même commune. La fillette avait disparu alors qu'elle jouait près de son domicile. Elle avait été retrouvée dans un bois, étranglée, avec du sperme sur sa chemise. Malgré plusieurs analyses génétiques, l'enquête n'avait pas permis d'avancer.

Jusqu'à une expertise confiée en 2013 à un laboratoire de Bordeaux, qui a permis d'identifier un profil ADN de sexe masculin, notamment sur les manches du sweat-shirt ayant servi à étrangler Saïda Berch. Pour les deux fillettes, il s'agit du même homme: Georges P., mineur à l'époque du premier meurtre et fiché à la suite de deux infractions commises en 2005 et 2008, notamment pour conduite sous l'emprise de stupéfiants. L'homme comparaît à partir de mercredi devant la cour d'assises de Grenoble, pour le meurtre de Saïda.

"Handicap mental léger"

L'accusé, aujourd'hui âgé de 41 ans, a d'abord reconnu les faits lors de sa garde à vue en juillet 2013, avant de se rétracter au cours de l'instruction, durant laquelle il a refusé de se prêter à de nouvelles analyses génétiques ou de participer à une reconstitution.

"La grande difficulté, c'est que la cour d'assises va être amenée à juger des faits qui remontent à plus de 20 ans, avance Me Denis Dreyfus, l'un des avocats de Georges P.. Et savoir ce qu'il pouvait avoir dans la tête au moment où il est passé à l'acte, si c'est lui qui est passé à l'acte, ça va être extrêmement compliqué, voire redoutable."

L'accusé est en effet atteint de la maladie de Steinert, qui provoque une dégénérescence musculaire parfois associée à un retard mental. Diminué physiquement, atteint d'un "handicap mental léger", voire de "psychose" selon les experts, il "n'est pas prêt à répondre aux questions", selon Me Emmanuel Decombard, son second avocat.

Il continuait de fréquenter les familles des victimes

Le procès s'annonce difficile pour la famille de Saïda, car l'accusé avait continué de vivre dans le même quartier, fréquentant les frères et soeurs des deux victimes. Il lui arrivait même de confier son propre fils aux soins de la mère de Sarah Syad.

"On s'interroge aussi sur cette attitude qui consiste à rester dans ce périmètre-là, sans se poser de questions, et faire en sorte de reprendre une vie normale, explique Me Arnaud Lévy-Soussan. Et pour la partie civile que je représente, l'idée de l'avoir côtoyé, c'est effectivement insupportable."

L'accusé encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Il doit en outre être jugé ultérieurement, par un tribunal pour enfants, pour l'assassinat et la tentative de viol de Sarah Syad.

H. M. avec Mélanie Bertrand, Florent Bonnard et AFP