Deux "filles Distilbène" attendent réparation devant la justice

Les deux plaignantes ont attaqué le laboratoire UCB Pharma, qui commercialisait le Distilbène jusqu'en 1977 (photo d'illustration). - -
Deux "filles Distilbène", exposées pendant la grossesse de leur mère à cette molécule nocive, sauront ce jeudi si la justice leur donne raison. Face à elles, le laboratoire UCB Pharma qui a commercialisé ce médicament, interdit depuis 1977 aux femmes enceintes.
L'une d'elles, âgée de 45 ans, a subi une ablation de l'utérus et deux grossesses pathologiques. Son fils, polyhandicapé, souffre de graves lésions neurologiques et du système moteur. La seconde a pour sa part assigné le laboratoire pour des problèmes de stérilité.
Toutes deux imputent ces conséquences à la prescription à leur mère de Distilbène. Cette hormone de synthèse avait été prescrite en France entre 1950 et 1977 aux femmes enceintes pour prévenir les fausses couches, les risques de prématurité et pour le traitement les hémorragies de la grossesse. Avant que sa dangerosité soit avérée, et qu'elle soit retirée du marché.
Au laboratoire de fournir la preuve
Dans ce dossier, la Cour de cassation a renversé la charge de la preuve par un arrêt rendu le 24 septembre 2009: à partir du moment où une femme prouve qu'elle a été exposée au Distilbène, il appartient désormais au laboratoire attaqué de démontrer que son produit n'était pas en cause.
Pour Me Ivan Terel, avocat du groupe pharmaceutique, la responsabilité d'UCB Pharma, qui commercialisait le médicament avec Novartis, "doit s'apprécier au regard des connaissances de l'époque". "Dans les années 60 (...), personne n'avait conscience de sa nocivité", a-t-il plaidé lors de l'audience, le 16 janvier dernier devant le tribunal de Nanterre. "Il n'y a donc pas eu de faute du laboratoire du point de vue de la responsabilité civile."
En mars 2006, la Cour de cassation a toutefois estimé qu'UCB Pharma avait "manqué à son obligation de vigilance": des doutes sur la nocivité du DES "existaient" en effet "avant 1971 et dès les années 1953-54", a-t-elle souligné.
160.000 enfants exposés?
Selon le réseau DES France, qui soutient les victimes de ce médicament, au moins 160.000 enfants, nés pour la plupart dans les années 1970, auraient été exposés au produit. C'est entre 1964 et 1975 qu'il a été le plus prescrit.