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"Crimes de guerre" en Ukraine: comment sont menées les enquêtes ouvertes en France?

Les journalistes Pierre Zakrzewski de Fox News et sa fixeuse ukrainienne Oleksandra Kuvshynov ont été tués en Ukraine. Le parquet antiterroriste a ouvert une enquête en France.

Les journalistes Pierre Zakrzewski de Fox News et sa fixeuse ukrainienne Oleksandra Kuvshynov ont été tués en Ukraine. Le parquet antiterroriste a ouvert une enquête en France. - AFP PHOTO / FOX NEWS

Le parquet national antiterroriste a ouvert quatre enquêtes sur des possibles crimes de guerre commis à l'encontre de ressortissants français en Ukraine. Un travail d'investigations qui se fait dans le cadre d'une coopération internationale.

Un journaliste franco-irlandais mort le 14 mars dernier près de Kiev, trois Français qui ont survécu à des bombardements alors qu'ils se trouvaient en Ukraine. Des situations différentes mais qui constituent toutes de possibles crimes de guerre. Depuis un mois, les gendarmes de l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité et les crimes de haine enquêtent.

Au lendemain de la mort de Pierre Zakrzewski, le parquet national antiterroriste (PNAT), compétent lorsque des crimes sont commis à l'étranger à l'encontre de ressortissants français, avait ouvert une enquête pour "crime de guerre". Trois autres avaient été ouvertes le 5 avril pour des faits qui se sont produits à Marioupol, entre le 25 février et le 16 mars, à Gostomel, au nord-ouest de Kiev entre le 1er mars et le 12 mars et à Chernihiv, au nord du pays, depuis le 24 février.

"La première chose, c’est un travail classique d’investigation criminelle qui débute, à la différence que l'accès à la scène de crime est évidemment plus compliqué, par le recueil des témoignages les plus nombreux et les plus précis possibles autour de ceux qui ont été victimes voire de leur part même pour ceux qui sont vivants", explique à BFMTV Jean-Philippe Reiland, le patron de l'OCLCH.

Collecte d'indices

Ces victimes qui ont survécu aux bombardements, et qui pour certaines ont pu revenir en France, ont ou vont être entendues. Dans le cadre de l'enquête sur la mort du journaliste franco-irlandais de 55 ans à Horenka, près de Kiev, alors que son véhicule a été la cible de tirs, c'est le témoignage de Benjamin Hall qui va être crucial. Kournaliste pour Fox News également, il l'accompagnait. Le reporter a toutefois été grièvement blessé.

Comment enquêter alors que la scène de crime se trouve à quelque 2500 kilomètres de Paris? Et que les déplacements sont rendus difficiles dans un pays en guerre? "Nous allons collecter des indices pas nécessairement sur place mais aussi par le biais des réseaux sociaux, des sources ouvertes, d’autres témoignages qui vont arriver, ou via l’analyse d’images satellites qui peuvent être mises à disposition de façon à déterminer les faits en eux-mêmes", détaille le général Reiland.

Remonter la chaîne des responsabilités

Dans le cadre de la coopération judiciaire internationale, les gendarmes français pourront également solliciter l'aide de leurs homologues ukrainiens pour procéder au recueil des témoignages.

"Il y aura une phase un peu plus subjective qui consiste à aller déterminer les responsabilités des faits qui sont commis, poursuit-il. On va essayer effectivement de remonter la chaîne des responsabilités en partant de celui qui a commis les faits à celui qui aura donné l’ordre de les commettre."

Les investigations conduites par l'OCLCH ont pour but de nourrir les enquêtes ouvertes par le PNAT mais aussi celles ouvertes par la Cour pénale internationale qui se focalise sur les plus hauts responsables de ces crimes. D'ailleurs, Paris a décidé de mettre en place dans chaque brigade de gendarmerie et chaque commissarait de police la possibilité de recueillir des témoignages des réfugiés ukrainiens qui pourront venir nourrir l'enquête menées par la CPI.

"Nous sommes extrêmement tenaces et optimistes. Si on regarde derrière nous, des auteurs ont été jugés et condamnés par la Cour pénale internationale. On n'imaginait pas alors qu'Augusto Pinochet, Slobodan Milosevic, que Charles Taylor pourrait être jugés par un Tribunal pénal international, et pourtant ça a été le cas."
https://twitter.com/justinecj Justine Chevalier Journaliste police-justice BFMTV