"Cette laideur-là, je peux la partager", la victime d'un violeur en série se livre

Adelaïde Bon a été victime d'un violeur en série quand elle était âgée de 9 ans. Son agresseur a été arrêté vingt ans plus tard et condamné à 18 ans de prison ferme. Elle raconte son histoire dans La petite fille sur la banquise qui sort le 14 mars.

"Un dimanche de mai, je rentre seule de la fête de l’école, un monsieur me suit. Un jour blanc." Ce dimanche, Adelaïde Bon a 9 ans. C'était il y a vingt ans, l'enfant est alors victime d'un violeur en série, identifié et condamné bien des années après. La jeune femme qu'elle est devenue se confie dans La petite fille sur la banquise, un livre qui sort le 14 mars aux éditions Grasset.

Adelaïde Bon a été forcée par cet homme à la suivre. Il la viole dans une cage d'escalier d'un immeuble parisien. La petite fille de l'époque, poussée par ses parents, va porter plainte. Mais jusqu'en 2012, aucun résultat. l'agresseur d'Adelaïde Bon court toujours, elle grandit, année après année, elle avance dans la nuit". Jusqu'au jour où, elle reçoit un coup de fil de la police.

"Le téléphone sonne: 'c’est la Brigade des mineurs, vous avez bien été victime d’agression sexuelle le 13 mai 1990?', raconte-t-elle. Le temps, c’est arrêté. 'Un suspect a été arrêté.' C’était peu après Noël, et la première phrase qui m’est venue de me dire, 'c’est le plus beau cadeau de ma vie, je n’ai jamais reçu un cadeau comme ça'. La police n’a pas oublié."

72 victimes

L'homme, surnommé par les enquêteurs "l'électricien", a été confondu par son ADN après avoir été interpellé lors d'une bagarre avec un de ses voisins. Son surnom, il le doit à son mode opératoire: il se présentait sous cette profession afin de pouvoir pénétrer dans des immeubles du XVIe arrondissement, et s'en prendre à ses victimes les attirant en leur demandant de l'aide. Au total, 72 petites filles ont été agressées sexuellement ou violées entre 1983 et 2003.

Lors de son procès en 2016, l'homme a nié les faits. Il a été condamné à 18 ans de prison ferme. Les victimes ont pu elles se confronter à leur agresseur. "C’est la fin de la solitude, confie Adelaïde Bon. Cette laideur-là, je peux la partager. Je sais que ces autres corps la portent comme moi et qu’on est plusieurs à la porter." Pour la jeune femme, dont le livre pourrait inspirer de nombreuses autres victimes, et notamment celles dont parlent l'actualité ces derniers jours, il manque un élément à sa totale reconstruction.

"Une des choses qui m’a particulièrement frappée dans l’affaire dont on parle, de ce violeur qui sévissait dans la Sambre depuis des années (un homme a avoué 19 viols et agressions sexuelles le 28 février, NDLR), c’est qu’il est passé aux aveux. C’est tellement rare. Je n’ai pas eu ça. Sans doute peut-être, ça aurait enlevé un peu de laideur."

Justine Chevalier avec Cécile Danré et Alexia Ferré